Thierry CROUZET
Chronologie du superorganisme
Chronologie du superorganisme

Chronologie du superorganisme

Comme je l’avais fait pour le cinquième pouvoir, je vais tenter de lister les différentes étapes de l’idée de superorganisme. Au moins quatre concepts se rencontrent. Tantôt Gaïa (1 - la planète vivante), tantôt le superorganisme (2 - l’humanité vivante ou organicisme). Le cerveau global (3), entité émergente, serait le moteur intelligent de l’une ou l’autre de ces deux entités, éventuellement consciente. La symbiose (4) entre les hommes et les machines, notamment le Net, et plus encore le Flux, rendrait possible ce cerveau, sinon le superorganisme lui-même. Les machines seules seraient, suivant certaines hypothèses, capables de devenir un cerveau global. 1. IVe siècle avant Jésus-Christ. Aristote dans sa Politique imagine l’humanité comme un vaste organisme parmi les autres organismes. L’humanité n’y apparaît pas séparée de son environnement. Elle ne se reconnait pas en tant que telle. Ce n’est pas un hasard si ces considérations se retrouvent dans un traité politique car toute réflexion sur l’ensemble de l’humanité est éminemment politique et devrait être prise au sérieux par tous les hommes de pouvoir. 2. 1159. Dans Policraticus, John de Salisbury reprend l’analogie d’Aristote. Le prince = la tête, uniquement soumise à Dieu, et possédant une âme incarnée par l’Église. Le sénat = cœur. Yeux, oreilles, langue = les juges et les gouverneurs de province. Mains = soldats et certains fonctionnaires. Estomac = trésoriers et percepteurs. Pieds = paysans et artisans. 3. XVe. Léonard de Vinci compare la Terre et le corps humain. Les fleuves équivalent aux artères. Le flux et reflux de la mer équivaut à la respiration. Vinci émet l’hypothèse que le microcosme et le macrocosme fonctionnent de la même façon (principe des poupées russes aujourd’hui apprécié par les adeptes de la philosophie intégrale et souvent associé à l’idée de superorganisme -- ce qui ne me convient guère). 4. Fin XVIe. Notamment sous l’influence de Francis Bacon, nature et humanité divergent dans l’esprit des philosophes et des scientifiques (le réductionnisme ne cessera de les séparer -- ce qui explique pourquoi le holisme a aujourd’hui tant de mal). 5. 1795. Le géologue James Hutton, précurseur de la théorie de l’évolution, publie The theory of the Earth. Il y écrit « I consider the Earth to be a superorganism and that its proper study should be by physiology. » 6. Début XIXe. Lamarck considère la nature comme un tout, insistant sur similitudes entre les composés biotiques et abiotiques. 7. 1872. Samuel Butler écrit « There is no security against the ultimate development of mechanical consciousness, in the fact of machines possessing little consciousness now. A mollusc has not much consciousness. Reflect upon the extraordinary advance which machines have made during the last few hundred years, and note how slowly the animal and vegetable kingdoms are advancing. The more highly organised machines are creatures not so much of yesterday, as of the last five minutes, so to speak, in comparison with past time. Assume for the sake of argument that conscious beings have existed for some twenty million years: see what strides machines have made in the last thousand! » Il écrit aussi « But who can say that the vapour engine has not a kind of consciousness? Where does consciousness begin, and where end? Who can draw the line? Who can draw any line? Is not everything interwoven with everything? Is not machinery linked with animal life in an infinite variety of ways? » 8. 1877. Thomas Henry Huxley, l’ami et défenseur de Darwin, voit la terre comme un système autorégulé. 9. 1885. Eduard Suess, un géologue autrichien, invente le concept de biosphère. 10. 1897. Herbert Spencer reprend l’analogie de la société comme un organisme, remarquant que les organismes évolués sont aussi des sociétés. À la mort d’un organisme, ses composantes lui survivent quelques temps. En revanche, la mort d’une composante n’affecte pas la vie de l’organisme. 11. 1922. Alfred Lotka constate que l’évolution biologique est liée à l’évolution de l’environnement. Il écrit « It is not so much the organism or the species that evolves, but the entire system, species and environment. The two are inseparable. » 12. 1923. Aldo Leopold écrit « [It] is at least not impossible to regard the earth’s parts—soil, mountains, rivers, atmosphere, etc.—as organs or parts of organs, of a coordinated whole, each part with a definite function. And, if we could see this whole, as a whole, through a great period of time, we might perceive not only organs with coordinated functions, but possibly also that process of consumption and replacement which in biology we call the metabolism or growth. In such a case we would have all the visible attributes of a living thing, which we do not now recognize to be such because it is too big and its processes too slow. And there would also follow that invisible attribute—a soul or consciousness—which… many philosophers of all ages ascribe to all living things and aggregations thereof, including the ‘dead’ earth. » 13. 1924. Vladimir Ivanovitch Vernadski imagine le monde comme composé de sphères imbriquées : lithosphère (les roches, l’eau…), atmosphère, biosphère, technosphère (résultant de l’activité humaine) et noosphère (sphère de la pensée). 14. 1928. William Wheeler utilise le mot superorganisme pour décrire les colonies de fourmis. Un superorganisme (fourmilière) est formé d’organismes (fourmis) eux-mêmes formés d’organismes (cellules formant des systèmes distribués, système immunitaire, ou localisés, organes). 15. 1938. H.G. Wells publie World Brain où il imagine l’encyclopédie planétaire et la conscience planétaire, seule capable de prendre en compte les problèmes globaux. 16. 1959. Pierre Teilhard de Chardin publie Le phénomène humain où il imagine que nous nous unissons à la biosphère pour former la noosphère, le Christ cosmique qui doit tendre vers Dieu. Il prétend que nous développons une conscience collective. 17. 1960. Joseph Carl Robnett Licklider publie Man-Computer Symbiosis. Il y annonce que notre destinée est liée à celle des machines. C’est avec l’idée de créer la symbiose qu’il travaille à l’avènement d’Internet. 18. 1965. Arthur C. Clarke publie Dial F for Frankenstein. Notre réseau de communication formerait un esprit global. 19. 1967. Théodore Dobzhansky reprend la théorie de la noosphère et la débarrasse des idées religieuse, tant bien même il était lui-même très croyant. 20. 1974. James Lovelock, en collaboration avec Lynn Margulis, formule la théorie Gaïa. Il considère la Terre comme un organisme qui s’autorégule lui-même. Dans ce modèle, l’homme ne joue pas un rôle particulier, sinon celui d’un cancer dont Gaïa pourrait se débarrasser pour maintenir son équilibre. 21. 1977. Valentin Turchin publie The Phenomenon of Science où il suggère que l’humanité devient un métasystème, soit un organisme formé d’autres organismes. Il explique dans ce livre comment la complexité ne cesse de s’accroître (encore de la philosophie intégrale avant la lettre). 22. 1983. Peter Russell publie The Global Brain, version new age du superorganisme. 23. 1986. Joël de Rosnay publie Le Cerveau Planétaire. 24. 1993. Gregory Stock publie Metaman. Il voit le superorganisme comme une symbiose homme-machine. Pour lui nous vivons la quatrième transition de l’histoire du vivant. 1/ Apparition de la vie avec les procaryotes (cellules sans noyau). 2/ Eucaryotes (cellules avec noyau). 3/ Organismes multicellulaires. 4/ Superorganisme lié par la technologie qu’il nomme Metaman pour se dégager du vocable superorganisme. Je pense qu’entre 3 et 4 on ne peut pas négliger l’apparition des superorganismes chez les insectes (liaison chimique). L’étape 4 serait donc l’invention d’un nouveau type de liaison. 25. 1995. Joël de Rosnay publie L’homme symbiotique où il vulgarise l’interconnexion hommes machines et la création d’un superorganisme, le cybionte. 26. 2000. Michael Brooks publie Global Brain dans NewScientist. « THE LONGER I work on it, the more I become convinced that this will be reality very soon, much sooner than most people might think, explique Francis Heylighen. » Il défend la théorie selon laquelle le Net s’apprête à s’éveiller. « It will gradually get more and more intelligent. Eventually, it will form the nerve centre of a global superorganism, of which you, human, will be just one small part. » Dans un autre register, Daniel Dennett prévient « We have already made ourselves so dependent on the network that we cannot afford not to provide it with the energy and maintenance it needs. » 27. 2000. Howard Bloom publie Global Brain: The Evolution of Mass Mind from the Big Bang to the 21st Century (j’ai ce livre dans ma bibliothèque depuis des années). 28. 2002. Ben Goertzel publie World Wide Brain: The Emergence of Global Web Intelligence and How it Will Transform the Human Race. 29. 2005. Kevin Kelly publie dans Wired We Are the Web. « And the ways of participating unleashed by hyperlinks are creating a new type of thinking—part human and part machine—found nowhere else on the planet or in history. […] This gargantuan Machine already exists in a primitive form. In the coming decade, it will evolve into an integral extension not only of our senses and bodies but our minds. » 30. 2007. Francis Heylighen publie The Global Superorganism: an evolutionary-cybernetic model of the emerging network society (papier qui m’a convaincu de m’intéresser au sujet). 31. 2008. Dans The Technium, blog/livre débuté en 2004, Kevin Kelly publie Evidence of a Global SuperOrganism. Il suppose que The One Machine, le nuage de tous les ordinateurs de la planète, est lui-même un superorganisme. 32. 2009. Bert Holldobler et Edward O. Wilson publient The Superorganism: The Beauty, Elegance, and Strangeness of Insect Societies. 33. 2009. Nova Spivack publie Welcome to the Stream: The Next Phase of the Web. Il imagine que la densification des flux d’information qui circulent entre nous engendre un esprit global.

Je compléterai cette chronologie au fil des trouvailles et des lectures. Quelques sources où j’ai trouvé des billes : Les prémisses de Gaïa, La théorie de l’organicisme, Metaman, Principia Cybernetica Web.

Thierry Crouzet @ 2009-08-18 09:17:24

Chronologie du superorganisme http://bit.ly/43SgAb Sommes-nous d’infimes vermicules ?

Sir.chamallow??? @ 2009-08-18 09:21:39

Chronologie du superorganisme http://bit.ly/43SgAb Sommes-nous d’infimes vermicules ? (via @crouzet)

Christine Genin @ 2009-08-18 10:05:28

RT @crouzet Chronologie du superorganisme http://bit.ly/43SgAb Sommes-nous d’infimes vermicules ?

Elannuaire Azcrea @ 2009-08-18 10:27:23

@crouzet : Thierry et le superorganisme - la suite http://bit.ly/43SgAb :o)

Marc Tirel @ 2009-08-18 11:21:32

Merci Thierry !!!

Excellente et très utile chronologie

Luc Muller @ 2009-08-18 12:41:24

[LIEN] Chronologie du superorganisme http://bit.ly/46PBTF

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-18 13:55:23

"The Beauty, Elegance, and Strangeness of Insect Societies."

Si quelqu’un trouve la société des insectes plus belle que la société humaine, je refuse de suivre ses projets politiques : ils aboutissent à la destruction de la spécificité de la personne humaine.

La beauté de la société des insectes ?

Où l’esclavage conditionné domine ?

Toujours inquiet des gens qui trouvent cela beau.

Coeur du problème soulevé par la notion de superorganisme:

  • c’est une chose de rappeler à l’homme son environnement et ses interactions

  • c’en est une autre de développer une sorte de fascination pour le collectif, au point de passer à une vision totalitaire, qui est celle de la société des fourmis, modèle adopté par tous les fascismes et communismes.

Quand on observe les grandes parades des régimes totalitaires, tout est calqué sur l’ordre des fourmis et sa supposée beauté organiciste.

En somme, le passage de la notion de superorganisme au fascisme est à surveiller de près.

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Le concept même de fascisme n’est d’ailleurs pas loin de l’exaltation des flux : les faisceaux, réseaux organicistes de la société.

Dans le fascisme, le lien social est porté plus haut que la personne.

On n’y aime pas l’intellectuel libre, comme on n’aime pas le "troll", celui qui échappe au collectif grégaire.

Comme quand on place le flux au-dessus de la valeur du contenu.

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En supposant que le collectif est plus intelligent que l’individu, alors que souvent le collectif ramène à un plus petit dénominateur commun

(= principe de TF1 : ce qui connecte le plus c’est le plus grossier. La vulgarité génère le maximum de connexions

Le concept même de "vulagire" renvoie d’ailleurs à sa facilité à se "répandre", à connecter un maximum de gens.

Exalter la facilité de connection expose à réduire l’intelligence de la pensée. Il faut devenir "vulgus", simplifier pour réunir.)

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On retrouve même le principe pyramidal du fascisme si l’on place le concept d’un superorganisme au-dessus de tout.

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Le fascisme repose sur l’exaltation d’être un TOUT qui dépasse les personnes humaines individuelles.

Toutes les fascinations pour le TOUT sont inquiétantes.

Propices à développer des esclavages plus ou moins conditionnés.

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Chaque fois qu’on évoque le superorganisme, on voit débarquer, enthousiastes, ceux qui n’aiment pas la personne humaine, ceux qui exaltent la société des fourmis, ou la religion, ou le fascisme.

Ceux qui trouvent beaux les conditionnements collectifs :

"The Beauty, Elegance, and Strangeness of Insect Societies."

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Politiquement la notion est dangereuse, même quand les intentions ne sont pas au départ celles-là.

Maryvonne Piétri @ 2009-08-18 13:59:44

Merci ! c’est très riche et ...

bien que peu savante sur tous ces sujets, je crois au principe de synchronicité, et je lis actuellement un livre sur la biologie des croyances(réf. Biologie des croyances de Bruce H. Lipton, Ph.D.)

Je lis (à l’instant que je découvre ce texte sur la toile, p. 110 du livre): "relativement à la cellule de la membrane ADN "La membrane est un cristal liquide semi-conducteur contenant des portes et des canaux". L’auteur continue ... : A côté de mon Macintosh, il y avait un livre rouge intitulé "Comprendre votre microprocesseur" J’ai pris le livre et j’ai trouvé, dans l’introduction, la définition d’une puce informatique : "La puce est un cristal semi-conducteur contenant des portes et des canaux."

Je fus sidéré de réaliser que la similitude de leur définition n’est pas une coincidence. la membrane cellulaire est bel et bien l’équivalent (l’homologue) structurel et fonctionnel de la puce de silicone !.

Je reprends cette phrase : "Les machines seules seraient, suivant certaines hypothèses, capables de devenir un cerveau global."

Considérant que c’est le cerveau humain qui a projeté, pensé, conçu les machines, nous avons à l’intérieur de notre cerveau la capacité de ce mariage !"

Pour en savoir plus : http://www.brucelipton.com/

Bien à vous.

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-18 14:13:41

On estime que les insectes seront les derniers survivants :

les cafards résisteraient même à une catastrophe nucléaire.

Ceux qui trouvent la société des insectes formidable n’ont plus à se soucier de rien:

on estime que le réchauffement climatique profitera aux insectes.

Alors laissez l’homme tout détruire, il vous restera toujours vos chers insectes sociaux et connectés, increvables.

Le "cancer humain", véritable troll en soi pour Gaïa, sera enfin éradiqué, selon vos souhaits.

-

Laissez la politique humaine à ceux qui ne veulent pas ramener l’homme à l’insecte social, merci.

On a d’autres modèles que la fourmillière, fut-elle cybernétique, et plus beaux.

Henri A @ 2009-08-18 14:37:09

A 5/10 :

Tu as raison sur toute la ligne. Mais par rapport à qui ou contre quoi, on se le demande...

interdependance day @ 2009-08-18 16:06:47

@qui s’espère plus important qu’une fourmis

c’est très interessant ton approche et il faut évidemment en tenir compte dans les reflexions sur le superorganisme.

C’est cependant une vision que partielle de tout ce que contient le concept de superorganisme.

Voir la société comme un superorganisme n’implique pas forcemment d’uniformiser les individus. L’avantage d’uniformiser les individus c’est de réduire la complexité et d’avoir un superorganisme controlable par une poignée de personnes, ideale donc pour un dictateur.

Dans un superorganisme non uniforme la complexité est telle qu’elle échappe complètement à tout controle individuel, cela n’en reste pas moins un superorganisme.

Notons que chez les fourmis il n’y a pas de chef, c’est peut-être l’une des choses que je trouve belle. En ça l’homme est bien inférieur à la fourmis, car il doit encore trop souvant se soumettre à un chef pour rendre son comportement compatible avec la société.

je pense que ce que le superorganisme évoque à Thierry ce serait au contraire l’hyper individuation de l’individu pour exacerber la complexité de la société.

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-18 17:14:02

"par rapport à qui ou contre quoi"

Henri, ce que je n’aime pas c’est quand vous nous faites le coup :

"je n’ai pas dit ça".

On dirait des hommes politiques qui présentent un discours électoral bien rodé, et disent ensuite "je n’ai pas dit cela", dès qu’on sort de leurs balivernes pour leur soumettre une conséquence dangereuse.

Un discours politique n’est pas un discours littéraire:

ce qui compte ce n’est jamais la lettre du discours avec les bonnes intentions et les promesses,

mais les conséquences sociales et les récupérations dans la vie sociale réelle.

Ce n’est pas un discours poétique qui peut défendre son autonomie littérale contre toute déviance.

Quand je lis un discours politique, je le mets en relation avec son effet social, et je parle de cela, pas de la lettre idéale et bien rodée qui n’est que de la propagande.

--

J’ai vu des dizaines de docs de la BBC étudiant de très peu la vie des insectes.

La vie sociale des insectes, c’est le fascisme.

Le fascisme organiciste.

Quand Thierry cite un mec qui s’extasie devant la beauté de la vie sociale des insectes,

c’est comme s’il s’extasiait devant la beauté des faisceaux fascistes de Mussolini.

-

La vie sociale des insectes est abominable de conditionnement esclavagiste et de matérialisme borné,

je refuse qu’un type qui trouve cela beau nous donne des leçons politiques.

Je n’écoute les leçons politiques que des gens qui aiment l’humanité, et pas de ceux qui envient le conditionnement mécanique des insectes.

--

@ interdependance day

Je réagissais à la phrase citée par Thierry sur la beauté de la vie sociale des insectes.

L’absence de chef n’est pas décisive. Les fourmis ont des castes de guerriers, et pratiquent le rapt et la mise en esclavage. Ce n’est pas "beau".

La vie des fourmis est déterminée à la naissance, il n’y a pas d’évolution sociale.

C’est le fascisme organiciste. C’est moche, étriqué, sans évolution, mystico-utilitariste.

Qu’on commence par dire que ce modèle social des insectes est laid avant de vouloir changer le monde.

Henri A @ 2009-08-18 17:58:25

Au mammifère :

Il me semble que c’est toi qui a une expérience politique. Je ne vois que des spéculations scientifiques, des analogies, des exemples….Ce que « les politiciens » très « humanistes » peuvent en faire, c’est autre chose.

« La vie sociale des insectes, c’est le fascisme. »

Comme le lion adulte est une brute et la lionne, une mère attentionnée, ce qui veut dire un ethnocentrisme dégénéré de ta part.

« Quand Thierry cite un mec qui s’extasie devant la beauté de la vie sociale des insectes,

c’est comme s’il s’extasiait devant la beauté des faisceaux fascistes de Mussolini. »

Je signale au passionné d’histoire et de « réalité » que les faisceaux fascistes, faire parti d’un tout plus grand, suivre un guide, tout cela est la propagande, c’est une méthode et non une fin. Ce sont comme d’habitude des moyens pour qu’une certaine élite financière puissent continuer de l’être au dépend d’une grande majorité.

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-18 19:19:03

"c’est une méthode et non une fin"

Oui et non.

Il y a une mystique fasciste.

Ensuite il y a effectivement des opportunistes, qui un jour utilisent le fascisme comme méthode, et un autre jour trouvent plus avantageux d’exploiter à leur compte le système démocratique représentatif.

Mais la mystique fasciste existe, et c’est elle qui a séduit pas mal d’intellectuels et de bonnes femmes, fascinés par la "beauté" de ces faisceaux sociaux créant une société organiciste où chacun avait un rôle au sein du grand corps social.

De même que Pétain a trouvé un grand écho avec sa mystique sociale : retour à la terre, familles, corporations, réseaux :

"chacun est défini par son lien social,

celui qui n’a pas de lien social prioritaire est un troll, un parasite, un déviant, un vilain électron libre."

La proximité entre le pétainisme et certains rêves écolos-organicistes a d’ailleurs déjà été analysée.

On a toujours des gens qui ne sont pas satisfaits par la condition humaine précaire responsable et évolutive, et qui rêvent de se fondre dans un grand tout où chacun trouve un rôle défini et formaté.

Henri A @ 2009-08-18 19:25:09

Cela se tient.

J @ 2009-08-18 19:42:10

tout ça est vraiment too much voire néo post, et divertissant :)

quand même, cette histoire de fourmis "sans chef", tsss tsss.

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-18 19:51:15

(J’ai remarqué que presque systématiquement, les gens les plus doués et les plus créateurs étaient les moins connectés.

D’une part, la création véritable comble. Et ne laisse plus de temps ni d’envie de connecter à tout va.

D’autre part, le temps passé à la connection est perdu pour la création et son mûrissement intérieur.

--

Dans une vie, on a besoin d’une dizaine de connexions essentielles pour trouver sa nourriture intérieure et ne pas être un ver solitaire.

Au-delà, les centaines de connexions ne servent à rien sauf aux plans marketing à la con.

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Je ne suis pas pour la coupure radicale et la déconnexion d’Internet, parce qu’Internet est un superbe outil.

Mais il faut réduire le cercle des connexions.

L’outil n’est pas la fin.

Sinon, cela me fait penser à ces gens qui accumulent des centaines de livres pour leur retraite, et qui meurent sans en lire aucun.

Ils sont passés à côté de la finalité véritable du livre, qui n’était pas de "pouvoir servir un jour donc on accumule et on verra", mais de nourrir maintenant.

La connexion ne doit pas devenir la finalité de l’existence.)

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D’ailleurs, vous avez vu que Charlie ne cause plus sur Internet ?

Si c’est pas une preuve que les gens vraiment bien ne sont pas dans l’hyper connexion !!

Louis-Martin Michaud @ 2009-08-18 20:06:35

Excellente chronologie du Superorganisme de Crouzet - permet d’approfondir http://bit.ly/EvYgr

Philippe @ 2009-08-18 20:16:45

Excellente chronologie du Superorganisme de @Crouzet - permet d’approfondir http://bit.ly/EvYgr (via @lm_michaud)

J @ 2009-08-18 20:17:02

d’où la question : une fourmi très connectée est elle une fourmi bien ou une fourmi mâle.

el-annuaire @ 2009-08-18 20:22:15

"J’ai remarqué que presque systématiquement, les gens les plus doués et les plus créateurs étaient les moins connectés... Si c’est pas une preuve que les gens vraiment bien ne sont pas dans l’hyper connexion !!"

mais qu’est ce que c’est que ce discours à la fin ?...

Non mais ça vous prend souvent d’insulter les gens gratuitement sur internet ?

On croit rêver... des jugements, des jugements et une tonne de jugements sur le discours et les autres en général... et béh ça donne pas du tout envie de se connecter avec vous :-p

Merci beaucoup Thierry de mener cette réflexion et cette étude pour nous.

Martin Dubois @ 2009-08-18 20:29:33

Débat hyper-polarisé sur un avenir ésopété de notre monde hyper-connecté: http://bit.ly/1gUe62

Iza @ 2009-08-18 21:22:31

"je le mets en relation avec son effet social" ... et donc souvent tu surinterprêtes voire tu récupères.. d’où la réaction "je n’ai pas dis ça".

Parce que tu mets en relation avec l’effet social supposé passé par ton prisme ... bref.

Alors que je lis dans ce que tu écris bien des choses avec lesquelles je suis d’accord (en passant, on peut trouver le progrès de la "connexion" devenue possible faramineux, et préférer la qualité à la quantité) ... je bondis en lisant ce que tu écris sur le lien social.

Sans doute parce que c’est un vocable que nous utilisons, dans mon métier.

Je n’ai pas ta plume, ton energie, ta culture ... mais je veux juste te dire que je ressens souvent ça en te lisant, je me dis "c’est facho ça ...". Ce mépris du commun, du "vulgus"... ça me fait penser au "théâtre des opérations" de Dantec fustigeant la médiocrité. Et comment te dire, pour moi, Dantec, c’est le pur néo conservateur facho. J’aurais du mal à te le démontrer (comme tu me l’as si gentiment fait remarquer, je ne contribue que sporadiquement et sans grande substance)... mais je te livre tout de même mon impression. ça n’enlève rien à d’autres intéressantes choses que tu écris, mais ce raccourci là...non.

J @ 2009-08-18 23:03:26

axe, tu es un fafiste, et c’est mal.

une fourmi fafiste en plus, et fa c’est triste.

car la fourmi est l’avenir de l’homme, et le fafisme ne passera pas la porte de la fourmilière ni du fuperorganisme, fafe le!

non mais...

Nous ne sommes pas des insectes @ 2009-08-19 02:09:36

"Ce mépris du commun, du “vulgus”…"

Parce que tu ne méprises pas TF1 ?

Le problème c’est que tu interprètes ce "vulgus" dans un sens d’esprit de caste, élitisme, mépris du peuple, etc.

Alors que ce que j’appelle vulgus, ce n’est pas le petit peuple, mais l’être grégaire balloté et manipulé. Souvent des grands bourgeois d’ailleurs.

Typiquement vulgus : les duchesses à la con des salons mondains, tous les snobs, etc.

-

J déjà trouvait trop élitiste ma méfiance du peuple manipulé par les populistes,

en y voyant un mépris du peuple,

alors que c’est chez moi un mépris des populistes et des manipulations de masse.

Ce n’est pas le "petit" que je méprise, mais le grégaire, celui qui suit la mode, qui hurle avec les loups, qui RT le dernier buzz pour être dans la masse, etc.

Je n’ai jamais compris le mec qui croit qu’il est important d’être à la mode, de suivre.

La connerie type du vulgus :

"Ah bon, tu es encore sur MySpace ? C’est has been au possible, t’es un plouc ! Faut être sur Facebook maintenant"

C’est lui le vulgus.

Et six mois après c’est Facebook qui est devenu "has been", faut être sur Twitter pour être "in".

Et six mois après il faut être sur Friendfeed.

Ces mecs sont des ânes.

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On n’a plus le temps de rien approfondir, faut passer sans cesse à la dernière nouveauté du jour.

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Des suiveurs pseudo-avant-gardistes qui confondent changement de format et création de formes.

Tout ce qu’on découvre du flux sur Twitter c’est assez affligeant : ce sont les conneries qui chaque jour créent une mode nouvelle. "A suivre et propulser", bien sûr. Jusqu’à la nouveauté du lendemain.

Je n’y vois pas beaucoup d’avancées créatrices.

-

Beaucoup confondent changement de format et invention de forme.

Changer de format, ça n’a rien à voir avec inventer une forme.

Les mecs qui se battent pour être le premier romancier sur Twitter, confondent changement de format et création de forme.

--

Quand Céline invente un style ça n’a rien à voir avec le nombre de caractères dans ses phrases.

Mais pour buzzer sur Internet, on reçoit plus d’échos en changeant le nombre de caractères qu’en créant un style : c’est bien là le syndrôme de la superficialité de ce monde du buzz connectif.

Iza @ 2009-08-19 10:52:55

"Ce n’est pas le “petit” que je méprise, mais le grégaire, celui qui suit la mode, qui hurle avec les loups, qui RT le dernier buzz pour être dans la masse, etc"

ok, effectivement il y a une nuance. Voici la mienne : le problème, c’est que pour avoir conscience qu’on se comporte de cette façon (comme un mouton bélant avec les autres), il faut un peu ... comment dire... "s’éveiller". et ce n’est pas toujours à la portée de tout le monde, facilement. En effet, bien des gens évoluent dans des conditions qui ne laissent pas beaucoup de place, d’opportunités pour "s’éveiller". Ignorer cela quand on les traite d’ânes, c’est les mépriser. C’est railler le mauvais goût "populaire", tellement "vulgaire" donc.

Pour TF1 (et tout le reste), ce que je méprise (et que j’exècre), c’est l’utilisation tout à fait cynique que certains font de ce phénomène (on prend les gens pour des cons et ils en redemandent, quelle aubaine). C’est la façon dont ils minimisent leur responsabilité. C’est la façon dont ils manipulent des bazookas avec la précaution d’enfants de 3 ans. En s’en mettant plein les poches, en faisant taire leurs scrupules. j’ai dit "certains", pas "tous". On pourrait faire de la télé et de la prod sans ça, sans ce mépris justement. Certains le font, preuve que c’est possible ....

Là où je pourrais te rejoindre, c’est que ce sur quoi je travaille (cette "compétence" qui permet d’être conscient de ce qu’on fait, d’être véritablement critique sans se contenter de repeter des poncifs etc ...) est censée être plus accessible pour certains que pour d’autres donc. Je ne méprise pas les publics très loin de la culture, très "populaires", j’ai moins de sympathie pour des gens qui sont très correctement équipés et qui font plutôt preuve de paresse intellectuelle.

Les cyniques dont je parle plus haut, et bien d’autres en font partie. Conclusion : tout le monde aurait bien besoin de se poser et de réfléchir, et d’échanger ... enfin bref, vive l’éduc pop !!!

Devalnor @ 2009-08-19 10:55:17

Dans les romans Ilium (2003) et Olympos (2006) de Dan Simmons, il y fait référence à la Noosphere de Vladimir Vernadsky. Il utilise l’idée de la noosphère pour expliquer les origines de la puissance des entités/avatars que sont Ariel et Prospero, qui découlent d’un réseau de machines d’une post-logosphère Internet. Il ré-imagine une société d’humain "à l’ancienne", société oisive et vaine qui rappelle celle des Eloïs décrits par H. G. Wells, et qui précède les Post-humains qui ont laissé sur Terre des vestiges prouvant à quel point leur usage de la technologie était poussée et qu’ils en avaient perdu le contrôle.

C’est en lisant ces romans (que je recommande vivement) que j’ai prit conscience du concept de superorganisme.

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