Thierry CROUZET
Finkielkraut: le net, lieu de la liquéfaction
Finkielkraut: le net, lieu de la liquéfaction

Finkielkraut: le net, lieu de la liquéfaction

« Vous êtes tous pourris, vous avez compris ? Vous êtes en état avancé de décomposition. Vous n’existez même pas. » Voici comment je pourrais résumer la pensée de Finkielkraut au sujet du Net après avoir écouté son entretien avec Pierre Lévy organisé par Michel Alberganti sur France Culture.

Mise en garde. Ma lecture est biaisée. Je suis en train d’écrire un livre sur la fluidification de l’information, de la société et de l’homme. Pour moi, c’est un phénomène en grande partie positif, même s’il engendre pas mal de bouleversements (mais le bouleversement est-il négatif ?).

Quand Finkielkraut s’exclame que « Le net est le lieu de la liquéfaction. », je ne peux qu’être d’accord mais, contrairement à lui, je ne trouve pas ça catastrophique. Deux visions s’opposent. On revient à l’éternel débat entre essentialistes et anti-essentialistes.

De l’auteur

En 2001, Finkielkraut écrit : « Il y avait l’autorité du prêtre, il y avait l’autorité du maître, il y avait l’autorité de l’auteur : tous ces surmois sont engloutis dans le grand pêle-mêle numérique. » Bonne analyse mais c’est pas une catastrophe. Au contraire. L’autorité n’est plus nécessairement concentrée dans une personne, bien qu’elle puisse encore l’être ; elle peut aussi se distribuer dans un groupe qui a la particularité de ne pas être centralisé (s’il l’était on se retrouverait dans l’ancien paradigme).

Arrive l’idée d’intelligence collective de Pierre Lévy. Un groupe de gens qui interagissent, partagent des connaissances, discutent, aboutissent collectivement à une forme d’expertise. D’une certaine façon, nous en sommes là sur ce blog. Les uns viennent rappeler les ignorances des autres, apporter des pistes de lectures… et peut-être que ça nous fait avancer. En tous cas ça me fait avancer autant que de lire des experts ou même des auteurs auréolés de leurs césars.

Je ne dis pas que les experts comme les auteurs n’ont plus d’importance, je dis simplement que des collectifs peuvent aussi produire une expertise et, pourquoi pas, une œuvre. Qui nous dit que les flux de certains blogs ne seront pas plus tard considérés comme des œuvres.

Franchement, si dans cent ans nos descendants relisent nos échanges, je pense qu’il y aura de quoi se marrer et de toucher à quelques unes des particularités de notre temps, plus que dans n’importe quel roman à la noix publié aujourd’hui. Nous n’avons pas l’once d’un outil critique pour juger ce que nous sommes en train de produire. Je crois que nous pouvons voir l’ensemble des contenus postés sur un blog comme une œuvre collective. La recherche du temps perdu du vingt-et-unième siècle est peut-être là.

Bien sûr que nous avons besoin des œuvres pour nous construire mais ces œuvres ne sont plus nécessairement l’œuvre d’un homme en particulier. C’est d’ailleurs un truisme. Une ville est une œuvre, une œuvre collective, tout comme de nombreux bâtiments. La culture humaine est une œuvre collective. La Bible est déjà une œuvre collective.

De la démocratie

Pour Finkielkraut, le concept d’intelligence collective est éminemment démocratique, d’une démocratie qui serait extrémiste et populiste. Il confond égalité et liberté.

Les fourmis développent une forme d’intelligence collective sans que nous ayons besoin de parler pour elles de démocratie. Pour moi, il n’y a aucun lien entre les deux concepts, aucun amalgame possible. Une équipe de foot développe une intelligence collective, un peloton de cyclistes aussi tout comme des oiseaux qui volent en flotte.

Il y a intelligence collective quand des agents coopèrent et produisent ensemble quelque chose que seuls ils ne pouvaient réaliser (l’intelligence ne poursuit pas ce qui est bien – notion trop humaine). Wikipedia est en ce sens le fruit d’une intelligence collective et elle dépasse toutes les encyclopédies créées par des intelligences collectives qui reposaient sur des groupes beaucoup plus réduits. Le web résulte d’une intelligence collective gigantesque qui nous permet de lier entre eux toutes nos connaissances.

La liberté est dans ce cas fondamentale : chacun a le droit de lier entre elles les informations qu’il désire sans rien demander à personne. Donc la démocratie favorise a priori l’intelligence collective, elle lui donne plus d’ampleur et nous pouvons rêver de plus de démocratie pour aboutir à plus d’intelligence collective.

De l’intelligence

Pour Finkielkraut, le monde de l’intelligence ne serait pas égalitaire, la démocratie ne s’y appliquerait pas. Oui mais quel rapport avec le net ? Il explique que dans le domaine de l’intelligence, du génie, du talent… il y a des hiérarchies.

Soyons clair, ces hiérarchies sont toutes relatives. Les auteurs qu’on place au pinacle à quinze ans ne sont pas les mêmes que ceux qu’on choisit plus tard. Quel serait l’âge idéal pour définir la hiérarchie idéale ? On voit tout de suite dans quel embarras on se trouve.

Finkielkraut semble surtout ignorer que le web est hiérarchisé : popularité, autorité, tagué… Sans ces hiérarchies, il n’y aurait pas de Google. Mais ces hiérarchies sont relatives soit à des algorithmes, soit à des classements manuels. Ces hiérarchies cohabitent, se concurrencent.

Le web n’est pas un monde égalitaire mais un monde de liberté. Je ne vois pas de rapport entre égalité et liberté. C’est la démocratie qui tente de lier les deux concepts mais le web n’est pas démocratique. Il est fraternel peut-être, libertaire à coup sûr, mais pas égalitaire. Deux hiérarchies ne se valent pas, ça n’a tout simplement aucun sens de les comparer.

Du fleuve

Finkielkraut a peur de la surproduction engendrée par le web, de cette vague gigantesque qui noie tout. N’a-t-il pas peur d’être noyé lui-même ? Bien sûr qu’il est plus difficile que jamais d’émerger, bien sûr que le populisme favorise les œuvres les plus faciles (celles de Finkielkraut justement)… mais est-ce différent d’avant ? Flaubert ne cesse de se plaindre des imposteurs de son temps. Déjà il y avait assez de médiocres pour ensevelir les génies. Rien de neuf. On a juste changé d’échelle tout en inventant des outils de filtrage pour naviguer dans cet océan.

C’est ça qui énerve le plus les apparatchiks. On n’a plus besoin qu’ils servent de phare pour retrouver notre chemin. On peut établir nos hiérarchies, on peut explorer la longue traîne. Et si des œuvres géniales existent, nous finiront par les pêcher.

Finkielkraut ne supporte pas cette idée qu’il peut exister des propulseurs, des manipulateurs d’œuvres, des remixeurs… il rêve encore d’un temps où l’œuvre avait une réalité quasi idéale. « Tout devient manipulable, mais ça fait peur, dit-il en gros. Que le gouvernement ait ce pouvoir, c’est une chose. Mais que tout le monde l’ait aussi, c’est terrible. » Je trouve pas ça terrible. Nous jouons enfin à armes égales. Nous ne sommes pas égaux, loin de là, mais nous avons accès au même arsenal.

Dans mon prochain livre je cite Bruce Chatwin. « Les nomades n’ont pas de domicile fixe en tant que tel. Ils compensent cette absence en suivant des sentiers de migration immuable. » Ce qui se passe sur le web est de cet ordre là. Nous avons tout simplement changé de représentation du monde. L’espace web existe comme les sentiers de migration. On peut se repérer par rapport à lui comme le navigateur par rapport aux côtes. On parle de flot et de flux mais aussi de fleuve. Or le fleuve, c’est l’eau qui s’écoule en même temps que la berge. Nous construisons notre berge en traçant des liens qui dans notre monde ont une réalité incontestable. Le solide existe, il a simplement changé de nature. Faut regarder au bon endroit.

De la régression collective

Pour finir Lévy, qui dans ce débat parle peu mais parle juste, résume la position de Finkielkraut. « Tout ce que vous dites contre Internet d’autres l’ont dit avant vous contre l’écriture, contre l’imprimerie, contre les calculatrices de poche… » Finkielkraut s’exprime comme un disque rayé. Il prend un texte de la renaissance, par exemple De laude scriptorum manualium de Johannes Trithemius en 1492, et il remplace imprimerie par internet et le tour est joué.

L’homme parle bien, il tient le crachoir. Favorisé par Alberganti, il ne fait que nous dispenser son conservatisme affligeant. Faisant l’éloge de la difficulté, l’opposant à l’instantanéité. Si ce n’est pas un reliquat de ce vieux réflexe franchouillard : il faut en chier pour réussir ? Comment penser un monde réticulaire quand on est incapable de concevoir autre chose qu’une société pyramidale, où l’école n’a d’autre but que d’amener une élite au sommet de la pyramide ?

Finkielkraut se lance ensuite dans un éloge de la pluralité. Or, la pluralité, l’individualisme, l’individuation ne peuvent se développer qu’avec la liberté (démonstration dans le chapitre 4 de mon prochain livre). Justement, Internet nous laisse espérer un accroissement de cette liberté. L’idéal de Finkielkraut ne peut être poursuivit que par l’outil même qu’il dénonce, outil qui s’inscrit dans une longue tradition qui remonte au tout début de l’écriture et même avant… dénoncer la technique est ridicule, le livre est une simple interface de lecture, une technique comme une autre.

Finkielkraut a le toupet de se placer en défenseur de la diversité alors qu’il donne sa définition à toute chose, puis bâtit son raisonnement sur sa définition… même après qu’elle ait été mise en cause par Lévy qui, de temps en temps, ricane. Quelle patience. J’aurais pour ma part explosé et détruit le studio de France Culture. Bel exercice de rhétorique mais qui a dû séduire pas mal d’auditeurs encore une fois.

Finkielkraut inénarrable s’attaque à la notion d’information… prétendant que tout ne peut pas être information. Mais dans quel cadre référentiel se place-t-il ? Pour un religieux bien sûr Dieu n’est pas information, Internet ou pas d’ailleurs. Pour un physicien, certains d’entre eux en tout cas, c’est un peu plus facile d’imaginer que tout est information.

Finkielkraut finit par avouer qu’il ne sait pas surfer, qu’il ne sait pas se servir de l’outil… et que tout son discours ne fait que révéler sa peur et son ignorance. Il aurait pas pu commencer comme ça notre philosophe. « J’ai la trouille, j’y comprends rien, j’ai l’impression que le monde que j’aime fout le camp. » Au lieu justement de nous parler de lui, de ses tripes, de ce qui à la limite n’est pas information, il tente de construire un discours vide car il n’a pas l’expérience de ce dont il parle. Il évoque l’ascèse, l’étude. Mais sait-il vraiment ce qu’est l’ascèse, sait-il ce qu’est une véritable expérience philosophique ? Je laisse le mot de la fin à Lévy.

Ce que j’envisage de construire, et d’autres avec moi, c’est une planète où les traditions peuvent se rencontrer et dialoguer. Ce n’est absolument pas un univers de consommateurs comme vous persistez à le dire.

J’ai envie de courir au Canada embrasser Pierre Lévy.

PS : La position de Finkielkraut est en fait parfaitement logique. Comme il ne maîtrise pas internet, il ne peut pas le défendre. Comme il aime donner son avis sur tout, il ne peut donc que critiquer internet.

Philippe Gargov @ 2009-10-13 19:59:59

Magnifique =) A part ce "métrise" dans le PS de conclusion.

C’est plutôt comique, finalement, que l’on ne puisse qu’être d’accord sur la notion de liquéfaction (de mon côté, vous avez pas mal contribué ;) http://www.groupechronos.org/index.php/fre/themas/dossiers/les-medias-divaguent ).

Le seul petit bémol que je ferais à ce texte : certains tiennent un discours identique à l’ami Alain, alors même qu’ils maîtrisent parfaitement le net. Ils ne sont pas noyés sous la vague, connaissent les rouages… Mais leurs discours ont davantage de poids sur la scène médiatique, logiquement :)

arvic @ 2009-10-13 20:01:29

Je résume. ;-)

1/ Sur certains points (mais pas tous) Finkielkraut pense juste sauf que ce qu’il voit venir n’est pas si grave que ça (et c’est même peut-être bien). ;-)

2/Il voit bien qu’un monde auquel il tient s’en va, et c’est ça qui lui fait peur : "la vieillesse est un naufrage", surtout si l’on pressent qu’elle ne vous apportera pas la tranquillité.

3/ On ne sait pas où on va. Ça excite les aventuriers et ceux qui n’ont rien à perdre, mais ça inquiète ceux qui sont plus casaniers, ou bien qui ont quelque chose à préserver.

Bref, Finkielkraut tient une position tout à fait tenable et rationnelle, vue de sa paroisse. Il n’y a pas de quoi le trainer dans la boue en le traitant de minable, comme d’autres que toi le font sur le web. ;-)

J @ 2009-10-13 20:16:23

narvic, si ce personnage ne tenait pas la place qu’il tient dans les media, estampillé sage philosophe dont la parole doit éclairer le bon peuple (du genre wolton dans un autre genre), il n’y aurait pas lieu de l’écorcher.

il est un des fers de lance de ce qui devrait te préoccuper aussi, et qu’il se fasse écorcher sur le net par Lévy ou d’autres quidam est sain.

la fonction sociale que certains lui ont donnée est grande, et usurpée au regard du seul mérite intellectuel, et tend à peser sur les foules dans un sens qui me déplait.

donc je ne suis pas d’accord avec toi, il fait partie des icônes de faussaires à égratigner.

Hélène Samuel @ 2009-10-13 20:25:41

J’aime ton résumé narvic. J’aurais voulu écrire ce commentaire tel quel.

J @ 2009-10-13 20:35:58

c’est dingue ça... !

vu le clima t général vis à vis du net et des internautes, étant données les sorties récentes que ce personnage a fait au sujet du net (poubelle, n’importe quoi), vu que ce sont ces sorties auxquelles le bon peuple doit bien entendu acquiescer, cette indulgence vis à vis de ce soi disant philosophe est plus que douteuse!

je n’en dirai pas plus :)

Thierry Crouzet @ 2009-10-13 20:37:19

Finkielkraut n’est pas stupide, il parle bien, mais il comprend pas jusqu’au bout. Lévy fait que lui dire je suis d’accord avec vous mais... et oui ce qui est terrible pour lui et une immense opportunité pour l’humanité.

En écoutant l’émission, je me demandais juste comment j’aurais réagi. Sans doute très violemment toutefois. Pas sur ce ton courtois qu’avait Lévy. D’un autre côté, Le F est surentraîné. Et il use d’une rhétorique pourri que certains maitrisent bien ici-même. ;-)

@PhilippeGargov J’ai lu le papier... mais en diagonale pour le moment. J’évite en ce moment de creuser ce que les autres écrivent sur le flux. Je purge ce que j’ai à dire. J’écris mes 9 chapitres (5 terminé) et après je me documente (c’est ma façon de faire pour pas le me laisser influencer).

arvic @ 2009-10-13 20:47:40

@ J

Aucune trace d’indulgence dans mon propos, ni même du contraire. Essayez juste de mettre vos émotions de côté pour lire ce que cet intellectuel écrit réellement :

  • le web est un lieu ou tout le monde dit n’importe quoi. C’est parfaitement vrai, je suis totalement d’accord. Et alors ?

  • le web est un lieu ou se produit un desintermédiation massive qui remet en cause toutes les autorités (réallocation générale de l’autorité et de l’attention, disent d’autres, d’une autre manière). Comment ne pas être d’accord ?

  • le web est un espace où la seule régulation possible est l’auto-régulation. Et comment !

Finalement, Finkielkraut a très bien compris plusieurs des choses essentielles du web. Où est le problème ? Il rejette cette situation. Et alors ? Ça n’invalide pas son analyse.

Il comprend fort bien ce que le web remet en cause de son propre statut et de son autorité acquise dans les milieux intellectuels et médiatiques. Et vous voudriez, en plus, qu’il applaudisse à la fin de son gagne-pain ?

Henri A @ 2009-10-13 20:57:00

A Narvic et au taulier :

Les fils spirituels ( il a la même façon de parler, c’est pénible ) de Heidegger ne peuvent pas produire quelque chose de juste.

Thierry Crouzet @ 2009-10-13 21:03:23

Personne ici n’aura prétendu qu’il a même produit quoi que ce soit. ;-)

J @ 2009-10-13 21:04:50

internet est l’instrument privilégié du n’importe quoi.

voilà ce qu’il a dit.

il y a une différence d’avec c’est l’endroit où tout le monde dit n’importe quoi (qui au passage était la chose mot pour mot qu’avait dit je ne sais plus qui quand l’imprimerie est apparue, certainement un clône de fink qui devait bosser à la sorbonne de l’époque, ou pour l’église).

ensuite tu dis qu’il a compris.

je ne le crois pas.

il a lu, il a intégré les concepts clés.

mais ne les a pas ’’compris’’.

combien de fois en parlant avec des gens je me suis aperçu de cela.

comment aurait il pu les comprendre d’ailleurs étant donnée son ignorance des usages du net???

il a perçu un danger pour lui et sa parole divine, là c’est clair.

mais qu’il réagisse avec tant de violence et tant d’apriori, en posant de plus ses phrases dont il écoute chaque syllabe ce qui a le don de m’irriter, cela ne fait que me conforter dans l’idée qu’il sera en façe des internautes et des élites du genre Lévy dans les années qui viennent, avec qui son sait.

j’ai bien aimé le ton amusé voire sarcastique de Lévy :)

pas vraiment un aventurier Lévy d’ailleurs...

il y a fracture sociale, un certain nombre de forces ont déclaré la guerre au Net et à ses potentiels revivifiants que nous aimons, choisi ton camps...

J @ 2009-10-13 21:13:03

fink est un analphanet : pas grave.

fink est un chien de garde : plus grave.

Georges Silvestre @ 2009-10-13 21:39:01

Internet ou la vague rêvée du surfeur neuronique. Et oui, va falloir qu’ils s’y fassent : "On n’a plus besoin qu’ils servent de phare pour retrouver notre chemin. On peut établir nos hiérarchies, on peut explorer la longue traîne. Et si des œuvres géniales existent, nous finiront par les pêcher."

Paul-Henri Sauvage @ 2009-10-13 22:23:06

Bonjour,

Je partage tout à fait votre analyse... et puis j’en profite pour découvrir, avec beaucoup de plaisir, votre blog. J’y reviendrai, plus longuement, c’est sûr. J’y vois de quoi alimenter mes propres réflexions. Merci ! Paul-Henri

Pierre-alexandre Xavier @ 2009-10-13 23:01:57

Avoir raison ne produit aucune valeur... Et ça me fait bien rigoler de voir les médias traditionnels aller chercher de vieilles barbes pour venir à leurs secours. Hier, Télérama (presse) invoque la figure de Umberto Eco pour déclarer l’immortalité du livre. Aujourd’hui, la télé met Finkielkraut sous les projecteurs pour emballer le Web avec du PQ. Ça promet dans les semaines qui viennent...

En attendant, je rigole.

Olivier Auber @ 2009-10-13 23:08:36

Bonsoir Thierry, j’ai posté un petit commentaire là, et ça n’est pas pour rien ;-)

http://www.google.com/sidewiki/entry/100520274726768047264/id/6Yiq5ImEJwZ_WycpILd2DTCOlEQ

000 @ 2009-10-13 23:39:45

L’immense problème d’analyse au sujet d’Internet, c’est qu’aujourd’hui, quand on parle d’Internet, on confond deux choses :

1 : ce qu’on trouve sur Internet

2 : ce qu’Internet produit en propre.

Je suis le premier à bénir chaque jour d’existence d’Internet, pour ce qu’on y trouve.

Mais ce que j’y cherche et y trouve, a, en grande partie, été créé par l’ancien modèle économique.

En revanche, ce qu’Internet produit, c’est là que c’est le plus souvent insatisfaisant, notamment dans les domaines où la création a un coût.

-

La lutte contre HADOPI, si l’on y pense, démontre une chose :

les Internautes ont une peur absolue, de se retrouver limités à ce qu’Internet produit en propre.

Les Internautes savent que ce qu’ils aiment est produit par l’ancien monde, est donc protégé par le droit d’auteur, et c’est cela qu’ils veulent consommer gratuitement.

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La lutte contre HADOPI est une déclaration d’amour faite aux créations des Majors : "nous aimons et voulons ce que vous créez, nous ne sommes pas satisfaits par ce que produit l’Internet sous licence libre, nous avons besoin de vos produits sous copyright".

Il y a une certaine inconséquence, à aimer à ce point ce que l’ancien monde produit, et à vouloir détruire son modèle économique.

Pourquoi ne pas se satisfaire de l’art sous licence libre ? Parce que c’est de la merde, disent les Internautes, qui veulent les produits sous copyright.

000 @ 2009-10-14 00:02:19

"Je crois que nous pouvons voir l’ensemble des contenus postés sur un blog comme une œuvre collective. La recherche du temps perdu du vingt-et-unième siècle est peut-être là."

Il est vrai que Charlie sans cesse disparue a un petit côté Albertine fugitive...

Vivement qu’on arrive au volume de la Prisonnière !

Pour J et Henri A, on les rangera parmi les ridicules du salon Verdurin.

arvic @ 2009-10-14 00:09:59

On oublie aussi, à mon avis, une cause de l’incompréhension entre les intellectuels "traditionnels" et les "aventuriers d’internet" : l’Histoire, et son poids sur les individus, les familles, les sociétés, les cultures.

Il y a une tendance manifeste chez les "aventuriers d’internet" à théoriser le fait qu’il ouvrent une nouvelle page de l’histoire qui oblitèrerait tout ce qui s’est produit auparavant. Comme si ce qu’ils sont eux-mêmes, individuellement, familialement, socialement, culturellement, n’était pas le fruit de leur propre histoire, de leur propre bagage culturel.

Ne serait-ce que la langue que nous utilisons, elle est un produit de l’histoire, et notre histoire nous est transmise par ce moyen, et notre histoire conditionne notre possibilité d’expression aujourd’hui à travers elle.

Produire du nouveau, même si on le conçoit en rupture, c’est toujours du nouveau par rapport à de l’ancien. Il n’y a pas de nouveau sans un ancien préalable.

Même lorsque l’on explore de nouveau territoires, on n’y arrive jamais sans bagages. On y emmène son passé, et son histoire, avec soi.

Je trouve qu’il y a un véritable défaut de la part de bien des penseurs "modernistes" d’internet à prendre en compte cette part d’histoire qu’ils emportent avec eux. Pire, ils ont tendance à la nier, alors qu’elle est pourtant bien présente, malgré eux et quoiqu’ils en disent, ne serait-ce que dans la langue.

Finkielkraut est le défenseur d’une tradition. Ça ne suffit pas de dire que cette tradition est dépassée. Car ceux qui disent ça emportent eux-aussi cette tradition avec eux, sinon ils ne pourraient même pas dire ça. Ils ne diraient tout simplement rien et regarderaient Finkielkraut comme un Martien. Or, manifestement, ce n’est pas le cas... ;-)

000 @ 2009-10-14 00:15:15

"Produire du nouveau"

S’ils produisaient vraiment du nouveau, ils ne lutteraient pas contre Hadopi.

En l’occurrence ils piratent surtout l’ancien, plus qu’ils ne produisent du nouveau.

Les blogs sont un immense copier-coller des médias, le sentimentalisme en plus.

Cet article, comme des millions d’autres sur le Net, prend sa source dans un vieux média, France Culture.

La nouveauté du contenu est très réduite sur le Net.

arvic @ 2009-10-14 00:52:55

@ 000

"La nouveauté du contenu est très réduite sur le Net."

Je suis donc obligé de changer à nouveau de pied, puisque je tiens manifestement dans ce débat une position... intermédiaire. ;-)

Rien de nouveau sur le web ? Que puis-je montrer à celui qui ne veut pas voir, et ne semble guère avoir cherché à regarder ?

Il faut ou ne guère connaitre le web ou mal connaitre les médias traditionnels pour ne pas voir leurs différences profondes, et les réelles nouveautés qu’apporte le web.

Si le web ne propose rien de neuf à vos yeux, peut-être est-ce seulement parce qu’il ne produit pas ce que vous, vous cherchez. Et s’il ne le fait pas, c’est peut-être que ça n’intéresse que vous. Non ?

000 @ 2009-10-14 01:14:05

Disons que la nouveauté est relative, et se construit sur beaucoup d’emprunts.

L’immense quantité d’emprunts au monde ancien devrait inciter à moins le dénigrer, et à relativiser l’autonomie créatrice du Net.

Vous consommez beaucoup de films produits sur le Net, Narvic ?

Vous me donnerez leurs adresses :-)

-

J’ai vu sur votre blog du Ferré et du Dalida, du Lou Reed, j’ai peu vu l’éloge d’artistes nouveaux, sous licence libre, produits par le Net.

arvic @ 2009-10-14 01:42:27

Je "consomme" très peu de film, en général. Et mon rapport à la musique est essentiellement nostalgique.

Ce n’est pas là que, pour ma part, je vois venir de la nouveauté sur le net. Mais ce n’est pas là que je le cherche non plus. Je n’ai donc aucune opinion sur ces points précis.

Quant au texte et à la photo, en revanche, c’est tout autre chose...

Lionel @ 2009-10-14 02:06:23

Une erreur courante est de considérer l’internet comme un media. Or (je frémis en le rappelant), l’internet est un réseau; il relie.

L’internet relie les uns aux autres, dans toute la diversité de leurs valeurs respectives, et selon des degrés variables de perfection technique, des gens, des choses (leur représentation, à tout le moins), des époques, des visions, des pratiques, des savoirs, des interrogations, des pensées… et des œuvres.

Il est tout à fait spécieux d’affirmer que l’internet ne produit rien de valable en tant que media, puisque ce n’est pas un media.

Ce n’est pas le réseau qui a besoin du media, mais le media qui a besoin du réseau. Les promoteurs d’Hadopi l’ont bien compris, qui voudraient bien garder le réseau pour eux-mêmes.

000 @ 2009-10-14 02:07:40

"Je “consomme” très peu de film, en général. Et mon rapport à la musique est essentiellement nostalgique."

D’accord.

Le cinéma est l’art majeur du XXe siècle ; qu’il soit totalement absent sur Internet (en tant que création originale) pose question.

YouTube n’a pour le moment accouché d’aucune Nouvelle Vague digne de ce nom.

Internet n’est pour le moment lié à aucun mouvement artistique novateur.

On bute sur cette gratuité qui coupe les pattes des budgets créatifs.

000 @ 2009-10-14 02:14:38

"Il est tout à fait spécieux d’affirmer que l’internet ne produit rien de valable en tant que media, puisque ce n’est pas un media."

C’est intéressant.

Mais alors cela veut dire qu’on a toujours besoin des médias pour produire. Avec des modèles économiques.

Trop de gens sur le Net répètent que les médias ne servent plus à rien, le réseau direct citoyen à citoyen suffisant à tout.

arvic @ 2009-10-14 02:17:24

@ Lionel

Une erreur courante voudrait que contrairement à la radio, la télé ou la presse et son réseau de distribution, internet ne serait pas un média. ;-)

Dès lors qu’il a réseau de distribution, qu’il s’agit de distribuer de l’information entre des émetteurs et des récepteurs, et bien nous sommes exactement face à ce que l’on appelle... un média.

Votre distinction entre média et réseau est spécieuse : les médias sont des réseaux ! (mais tous les réseaux ne sont pas des médias)

Luc Jodoin @ 2009-10-14 02:35:07

Moi, je l’aime bien Finkielkraut et sa «haine de la pensée». Il fait avancer le débat. Les «aventuriers du Net» versent parfois un peu trop dans le refrain de la rupture et des lendemains qui chantent, sorte d’idéologie de la transparence et du partage : mai 68, flower power techno. Et je ne le crois pas du tout Finkiel quand il prétend être un «outsider» du Net. C’est une pose, il le connaît trop bien le grand tout numérique... et il nous nargue pauvre techno en quête de devenir ...

J’abonde dans le sens des propos de Narvic. Et j’ajouterais, en citant, je crois, Jean de Salisbury (Moyen-Âge): nous sommes des nains sur les épaules de géant...

000 @ 2009-10-14 02:47:13

"je ne le crois pas du tout Finkiel quand il prétend être un «outsider» du Net"

Puisque sa couverture est en passe d’être découverte...

Fink, dans le plus grand secret, pratique le Web depuis des années.

Sous un pseudo : Demian West. La terreur des médias citoyens.

000 @ 2009-10-14 04:48:06

Isabelle Balkany est énorme ! :-)

http://www.lepost.fr/article/2009/10/13/1739378_isabelle-balkany-il-n-y-a-pas-de-mobilisation-sur-le-web-contre-jean-sarkozy.html#xtor=ADC-218

"Jean Sarkozy se soucie-t-il de la pétition lancée par Christophe Grébert, qui prend de l’ampleur de jour en jour?

"Attendez, il faut remettre les choses à leur place. Christophe Grébert est un journaliste raté qui a fait quelques piges, avant de faire une fixation sur Puteaux et La Défense. Il faut arrêter de donner de l’importance à Grébert qui ne représente que lui-même. Cela fait quatre ans qu’il monte des blogs contre Joëlle Ceccaldi-Raynaud, l’actuelle maire UMP de Puteaux. Cela n’a servi à rien puisqu’elle a été élue maire de la ville en 2008. Il faut donc relativiser l’importance d’Internet..."

Justement, que pensez-vous de la mobilisation sur le Web contre la candidature de Jean Sarkozy à l’Epad?

"Mais il n’y a pas de mobilisation sur le Web contre Jean Sarkozy! Les gens qui critiquent sont par nature des opposants. Vous savez, il y a 50% de gens qui sont contre nous donc c’est normal qu’on les retrouve sur Internet, même s’ils sont surreprésentés. Après, il y a ceux qui bossent et qui ont quelque chose à faire et les autres, qui commentent... Nous, on bosse. Je ne nie pas l’intérêt et l’impact du Web mais il ne faut pas non plus transformer ce média en juge suprême contre le pouvoir. Christophe Grébert en est l’illustration suprême."

Lionel @ 2009-10-14 05:23:22

@ narvic

«[…] nous sommes exactement face à ce que l’on appelle… un média.»

Non, sur ce point vous vous trompez, relisez-vous ou interrogez J.-M. Planche, par exemple. L’internet n’est pas un media, même si, par l’internet, on croise *des* medias — mais pas que… L’internet en lui-même n’est ni une destination finale, ni une source première.

Par l’internet transitent écrit, image et son, toutes formes de médiation qui lui sont pré-existantes. La presse serait un media même sans réseau de distribution… ;-)

On voit bien l’importance du réseau. C’est tout sauf spécieux, un réseau; pas comme certains medias — je ne parle pas là des vôtres, dont je suis un assez fidèle lecteur :-) —, et l’internet neutre et acentré est le meilleur des réseaux, jusqu’à plus ample informé.

dm @ 2009-10-14 07:47:37

Sur Finkielkraut vous écrivez à la fin de votre article : "Il évoque l’ascèse, l’étude. Mais sait-il vraiment ce qu’est l’ascèse, sait-il ce qu’est une véritable expérience philosophique ?" Alors là vous touchez du doigt le fond du problème. Si F. était un penseur, un philosophe, s’il avait publié ne serait-ce qu’une seule page de "pensée philosophique" dans toute son oeuvre (si vous exceptez ses copiés-collés importés de Lévinas), il n’en serait là vis à vis d’internet... Il épuise surtout la définition de l’"intellectuel" qui n’existe QUE grâce aux médias classiques (journaux, radio, grandes maisons d’édition et leur marketing... ) exactement comme son ami BHL... En fait il est en pleine contradiction avec lui-même. C’est pathétique, mais ce n’est grave que pour lui-même...

Thierry Crouzet @ 2009-10-14 07:49:46

J’ai toujours présenté internet comme un territoire où des médias pouvaient éventuellement s’installer mais aussi des boutiques, des jeux en temps réels...

Pour être plus juste même il faudrait dire qu’Internet est un territoire sur lequel des protocoles s’installent, le web par exemple, sur lesquels peuvent s’installer entre autres des médias.

Voir Internet comme un média c’est zapper 99% d’Internet.

http://blog.tcrouzet.com/tag/territoire/

Fin article 1 : Les vieilles nations finiront par reconnaître internet comme une nation en elle-même. J’invoque dès à présent le droit à la double nationalité. Je ne veux pas utiliser internet que comme un média.

J @ 2009-10-14 08:00:39

@narvic a écrit : 14 October 2009 @ 0:09

tu as raison de parler des bagages de l’histoire, que nous portons tous en nous.

certains internautes et défenseurs de ce pauvre Net attaqué de toutes parts à présent (ceux que tu appelles les aventuriers du net, je préfère employer le terme de défricheurs) oublient cela, emportés par leur enthousiasme.

mais ce n’est pas le cas de tous, loin de là.

bien des penseurs de grande qualité (eux, contrairement à Finkielkraut!) expriment toutefois l’idée de rupture, ou de mutation.

on ne peut pas qualifier des gens comme serres, castells, lévy, quéau, et mille autres, de personnes oublieuses de l’histoire!

placer finkielkraut comme seulement défenseur de la tradition est à mon avis oublier ce qui pose réellement problème.

si on considère simultanément deux notions, la première étant que nos modèles de société sont en crise, la seconde que internet est l’espace où de nouveaux modèles de société s’expérimentent, fink n’est pas seulement un défenseur de la tradition, il est un boulet à nos sociétés qui doivent avancer vers des solutions d’ensemble innovantes.

pire, il n’est pas certain du tout, et tu l’as senti, qu’il n’agisse pas ainsi car il sent que sa rente de situation est menacée!

lévy l’évoque dans cet entretien face au zouave pseudo savant : ) , la révision par les pairs qui existe en sciences et qui fait probablement partie des régulations systémiques à l’oeuvre en ligne ne le laissera pas indemne, car ses insuffisances intellectuelles apparaissent et sont soumises à commentaires directs et sans détours, contrairement à ce qu’il se passe dans le monde merveilleux de drucker & consorts...

il y a en toi, et je le respecte, un esprit englobant qui semble te permettre de considérer ce personnage comme faisant partie du jeu, à sa place, et donc non condamnable.

pour ma part, vois y une faiblesse guerrière si tu veux, je ne m’accommode pas de ce genre de philosophe de gala, que je considère comme un irresponsable.

irresponsable pour la raison susdite et qui a trait à sa position de boulet dans l’indispensable quête de nouvelles régulations sociales.

irresponsable car à méjuger le phénomène par intérêt personnel et fénéantise intellectuelle, il ne prend pas la peine de réfléchir aux vrais risques liés à ce nouveau monde en ligne, ce qui devrait être le rôle d’un philosophe digne de ce nom.

Thierry Crouzet @ 2009-10-14 08:04:49

Mais il n’est pas philosophe il est prof !

J @ 2009-10-14 08:07:07

tout à fait thierry : )

un territoire.

il y a un très intéressant travail fait là dessus sous la direction de pierre musso.

c’est un biais analogique que de considérer internet comme un media.

et c’est pour ça qua le parallèle avec l’imprimerie est très incomplet.

J @ 2009-10-14 08:08:39

@thierry

je parlais de son étiquette sociale, pas de sa substance :)

dm @ 2009-10-14 08:23:39

Cette distinction médias/internet est fondamentale. C’est PARCE QUE Finkielkraut est l’intellectuel MEDIATIQUE type qu’il haït à ce point internet (il n’est d’ailleurs pas le seul dans cette catégorie).

Zackatoustra @ 2009-10-14 10:41:05

Finkielkraut est un philosophe. J’imagine qu’il connait donc sur le bout des doigts les reflexions de Zygmunt Bauman sur la forme "liquide" que prend la modernité.

Avant, la vie était simple : un cadre de hierarchisation "par le haut", des régulations(lois, normes,...), des contrôles permettaient à l’individu lambda de ne pas se sentir paumé. Pas d’incertitudes sur son rôle dans la société. Il pouvait à loisir envisager de tracer son chemin de A vers B (son "projet de vie", sa "carrière"), l’horizon était à sa place, hors de portée. Bref, le cadre "rigide" qui arrange tout le monde, sauf les "hors-cadres".

Maintenant, la vie, c’est dur : on est plus seulement consommateur passif, on est producteur de sens, actif. La rigidité se liquéfie avec les possibilités données à chacun de décider de sa voie (d’aucuns appellent cela la liberté). Du coup, on se peut plus tirer des plans sur la comète, ou compter sur l’horizon lointain pour nous rassurer, nous devons agir. De préférence pour le bien, généralement pour "notre" bien(individuel, social, ou humain)

Cette participation à la construction d’un corpus dans un contexte mouvant a de quoi effrayer les puristes de la hierarchisation, et les nostalgiques des temps passés.

(Il me semble acceptable d’émettre l’hypothèse que) Finkielkraut se place dans l’une, l’autre ou les deux de ces dernières catégories de personnes en mal avec le présent.

Soit.

Mais qu’il ne nous fasse pas chier en décrétant qu’Internet va tous nous étouffer, nous noyer.

Qu’il n’essaie pas de nous faire avaler que, pour le bien de la communauté intellectuelle Humaine, il faudrait revenir à un stade du développement où seuls certains sages sont doués de lucidité, de charisme et d’influence sur la populace.

Internet peut être vu comme un fleuve, aux sources innombrables. A certains endroits, le flux est très important, à d’autres, il est faible. Il est en tout cas fertile de ce qu’il crée, attire et facilite.

Si tu ne sais pas nager, Finky, reste sur la berge.

Mais, n’essaie pas de te mettre en travers de Notre fleuve fertile.

Zackatoustra @ 2009-10-14 10:42:42

Finkielkraut est un philosophe, avec un grand ou un petit P.

J’imagine qu’il connait sur le bout des doigts les reflexions de Zygmunt Bauman sur la forme "liquide" que prend la modernité.

Avant, la vie était simple : un cadre de hierarchisation "par le haut", des régulations(lois, normes,...), des contrôles permettaient à l’individu lambda de ne pas se sentir paumé. Pas d’incertitudes sur son rôle dans la société. Il pouvait à loisir envisager de tracer son chemin de A vers B (son "projet de vie", sa "carrière"), l’horizon était à sa place, hors de portée. Bref, le cadre "rigide" qui arrange tout le monde, sauf les "hors-cadres".

Maintenant, la vie, c’est dur : on est plus seulement consommateur passif, on est producteur de sens, actif. La rigidité se liquéfie avec les possibilités données à chacun de décider de sa voie (d’aucuns appellent cela la liberté). Du coup, on se peut plus tirer des plans sur la comète, ou compter sur l’horizon lointain pour nous rassurer, nous devons agir. De préférence pour le bien, généralement pour "notre" bien(individuel, social, ou humain)

Cette participation à la construction d’un corpus dans un contexte mouvant a de quoi effrayer les puristes de la hierarchisation, et les nostalgiques des temps passés.

(Il me semble acceptable d’émettre l’hypothèse que) Finkielkraut se place dans l’une, l’autre ou les deux de ces dernières catégories de personnes en mal avec le présent.

Soit.

Mais qu’il ne nous fasse pas chier en décrétant qu’Internet va tous nous étouffer, nous noyer.

Qu’il n’essaie pas de nous faire avaler que, pour le bien de la communauté intellectuelle Humaine, il faudrait revenir à un stade du développement où seuls certains sages sont doués de lucidité, de charisme et d’influence sur la populace.

Internet peut être vu comme un fleuve, aux sources innombrables. A certains endroits, le flux est très important, à d’autres, il est faible. Il est en tout cas fertile de ce qu’il crée, attire et facilite.

Si tu ne sais pas nager, Finky, reste sur la berge.

Mais, n’essaie pas de te mettre en travers de Notre fleuve fertile.

Y va finir par m’énerver, ce Fink.

000 @ 2009-10-14 10:52:26

"sa position de boulet"

Vouloir éliminer les boulets c’est le commencement du totalitarisme.

Il est vital qu’il y ait des résistances pour forcer les révolutionnaires à améliorer leurs expérimentations.

Colomb aurait peut-être fait demi-tour à mi-chemin, s’il n’avait pas été poussé par l’orgueil de montrer qu’il avait raison, face à tant d’oppositions.

Ce sont les boulets qui forcent les révolutionnaires à travailler davantage pour convaincre.

jcfrog @ 2009-10-14 11:44:55

F**Kielkraut est un troll! :)

Philippe Gargov / Groupe Chronos @ 2009-10-14 12:56:27

@Thierry Crouzet : merci pour le commentaire :)

  1. Je comprends très bien votre méthode ! Je regrette parfois de ne pas réussir à l’employer dans ma vie ;)

  2. Mon but n’est pas vraiment que vous le lisiez vous ^^. Ce texte est une synthèse avec un peu de réflexion, mais ne révolutionnera pas ce que vous dites bien mieux que moi (et dont je me suis directement inspiré) ! C’était davantage pour un de vos lecteur curieux que j’ai mis le lien (assez promo, désolé pour ça).

NB : je viens de penser au film Abyss et à tout ce qu’il pourrait illustrer dans le présent débat :) L’homme qui part à la rencontre d’une "créature d’eau", l’image est belle ! C’est tout ce que l’on pourrait souhaiter aux Finkelkraut de tout bord :)

reymonde\_007 @ 2009-10-14 13:54:23

RT @crouzet: Finkielkraut: le net c’est lieu de la liquéfaction http://bit.ly/J4Ses

J @ 2009-10-14 16:20:47

http://www.numerama.com/magazine/14224-la-bataille-hadopi-1-livre-non-3-oeuvres-collectors.html

tu as vu ça thierry crouzet, ils en veulent hein ces jeunes et moins jeunes : )

ps : m**** à la femis ; )

Thierry Crouzet @ 2009-10-14 17:04:15

Non. J’ai pas participé à cette bataille, souvent pas d’accord avec les anti-hadopi... car pas logique avec eux-mêmes comme je l’ai expliqué... et pas beaucoup écrit sur le sujet même si j’ai écris les choses sans doute les plus importantes :-) :-) :-)

000 @ 2009-10-14 17:20:54

"C’est une première dans l’édition, qui montre que la créativité artistique et commerciale n’est pas le domaine réservé des industries favorables à la lutte contre le piratage"

Parce que pour eux leurs torchons de tracts c’est de la "créativité artistique" ?

Ben merde alors !

Une sacrée bande de dégénérés.

Oser appeler "art" un t-shirt marqué Hadopi !

Vive la femis et la vraie créativité artistique ! La guerre est ouverte, et comme dirait Demian West, dans l’histoire ce sont toujours les artistes qui ont gagné. :-)

J @ 2009-10-14 17:24:38

hého crouzet, redescends un peu :)

ps : m**** au CNC

J @ 2009-10-14 17:31:09

il est très beau ce t-shirt, tu n’as vraiment aucun gout OOO :)

000 @ 2009-10-14 17:41:01

"m**** au CNC"

J, ou l’anti-chrysopoeia.

Quand il voit de l’or, il veut le transformer en plomb. L’homme du ressentiment typique. Détruire ce qui le dépasse. Un cas d’école. :-)

Gekko Hopman @ 2009-10-14 17:49:35

RT @beaucoupdemonde http://bit.ly/pnxJ8 Finkielkraut en phase de liquéfaction.

J @ 2009-10-14 17:58:48

: )

000 : on/off switch

je te taquinais, oh membre de l’élite incomprise : )

ps : as tu perçu tout de même le côté warholien à tendance beuysienne du t shirt , ça n’a pas pu t’échapper, un garçon cultivé et intelligent comme toi ;)

JeanneArgall @ 2009-10-14 22:29:34

RT @crouzet: Finkielkraut: le net c’est lieu de la liquéfaction http://bit.ly/J4Ses

0rw3ll @ 2009-10-14 22:50:59

Super article ! RT: @JeanneArgall: RT @crouzet: Finkielkraut: le net c’est lieu de la liquéfaction http://bit.ly/J4Ses

small•talks @ 2009-10-15 12:52:51

Bmk: Finkielkraut: le net, lieu de la liquéfaction http://ow.ly/15V6kl

Ucka Ilolo @ 2009-10-16 22:37:43

via @crouzet : Beaucoup d’intellectuels français critiquent internet par IGNORENCE http://bit.ly/J4Ses

Ucka Ilolo @ 2009-10-16 22:38:44

via @crouzet : Beaucoup d’intellectuels français critiquent internet par IGNORANCE http://bit.ly/J4Ses

florence meichel @ 2009-10-19 10:07:19

Assez déçue que tu n’aies pas cite mes tweets et mon billet

Serie de tweets datant du 13 octobre (entre 11h48 et 12h44)

scoop Finkielkraut : en ecoutant plevy je me dis que ma vie serait facilitee si j’etais branche sur le net, si j’avais appris a m’en servir

Finkielkraut avouant qu’il ne se sert pas d’internet ici http://bit.ly/37zbux

Les journalistes seraient bien inspires d’interviewer a l’avenir des experts d’internet plutot que des gens qui font semblant

alain Finkielkraut est un imposteur quand il parle d’internet ! il le dit lui meme !

j’ai aussi ecrit ce billet le 11 octobre http://fwd4.me/mk que j’ai remis a jour avec l’affaire finkielkraut

Thierry Crouzet @ 2009-10-19 12:29:09

Désolé mais j’avais pas vu tes tweets... C’est phyrezo qui m’a prévenu via Twitter en m’adressant un @ peu après la diffusion sur France Culture. D’autre part, depuis quelques jours, mes lecteurs, nottament J, m’avaient déjà invité à parler de F (cf commentaires).

florence meichel @ 2009-10-19 14:24:59

OK Thierry !

J @ 2009-10-19 14:31:12

j’espère thierry que tu n’as pas eu de ’soucis’ suite à ta sortie sur fingercrotte, comme l’appelle le très bon jmplanche lors de sa récente interview du non moins excellent jmbillaut.

c’est que comme des animaux blessés, ils sont agressifs ces gens là.

Thierry Crouzet @ 2009-10-19 17:56:35

@J Je vient de passer 5 jours à Paris totalement déconnecté. From TGV.

pidudu @ 2009-10-20 23:24:11

Finkielkraut: le net, lieu de la liquéfaction - http://shar.es/1Kv4P

yannc @ 2009-10-21 18:21:11

Comme je l’ai écris ailleurs : « grâce à l’ effet de dilution d’ Internet,

l’ eau de feu des médias traditionnels est devenue de l’ eau aromatisée».

Les donneurs de leçons, qui prétendaient tout savoir en toute impunité (au point de ne plus prendre la peine de cacher leur médiocrité), deviennent des savants parmi d’autres! Ils apprendront à gagner leur pain à la sueur de leur talent.

Il en va ainsi des intellectuels, mais pas seulement.

Les politiciens AUSSI voient leur surface médiatique partir à vau l’eau. On n’a plus besoin de s’infliger leurs jeux de jambes et leurs courbettes. Internet permet aux gens de s’associer sans passer par les fourches caudines de ces intermédiaires, ce clergé de gloutons qui contrôle l’État, la Culture, l’Administration, ce qu’on doit lire, écouter, manger, ce qui sort de telle ou telle usine, etc.

D’ où leur panique, et leurs tentatives législatives (Hadopi2), utilisant le prétexte culturel là où les ..point godwin!.. utilisaient le prétexte de la Nation.

C’est pratiquement du "Cultural Socialism", non?

Ce qui explique leur détermination à faire passer des lois pour CONTRÔLER Internet, coûte que coûte !! Ici, au prétexte de protéger les enfants par exemple (les parents sont idiots, mais l’État gère, comme d’habitude ; et on ne vous demande pas votre avis!).

Trop tard, les crapules! Les gens ont déjà retrouvé le goût et le souvenir de ce qui est vrai ;) C’est l’ ingrédient qu’ils avaient sur le bout de la langue et qui leur manquait.

diane tell @ 2009-10-22 08:57:16

Finkielkreut pris dans le filet ! (pour compléter le twitt précédent... http://su.pr/1ABA3o

Yannick Jost @ 2010-02-11 19:21:45

Finkielkraut : "Le net, lieu de la liquéfaction" http://bit.ly/b6nJGW

duclos-aprico jean-pierre @ 2010-05-03 17:26:22

Je ne sais si cela peut lui parvenir mais j’ai découvert Finkielkraut hier lors d’une émission télévisée ...j’ai été conquis par son propos , il frise le politiquement incorrect, mais est très réaliste. Je suis surpris que cela existe encore! bravo.

Michel Thierry @ 2010-09-16 01:06:30

L’ensemble des commentaires était prévisible... Ceux qui commentent connaissent le web et le principe des blogs. Ce que Fink critique ce sont les jugements à l’emporte pièce, les discussions de comptoir... Allez pas la peine de se la jouer, ce que nous vivons est une discussion de bistrot conduite par des joyeux drilles qui n’ont jamais ouvert un seul livre de Fink ou de Levy ou lu un livre philosophique de la première à la dernière lettre ! Internet c’est aussi un lieu de spontanéité, de l’instant fugace, une forme de défouloir... intelligence collective où es-tu ? Si nous étions plus intelligent collectivement nous n’aurions certainement pas eu Lepen sur une deuxième tour d’élection, nous n’aurions pas non plus voté Sarkozy... Où es-tu intelligence collective ? L’intelligence collective est un concept mou qui nous fait croire gentiment que nous sommes de plus en plus fort alors que le pouvoir naturellement se déplace ailleurs. Personnellement j’adore le web, je m’y balade, je m’inspire, j’y travaille mais je ne suis pas dupe, ceux qui détiennent le pouvoir, les ficelles ne sont pas dans le web mais au-dessus du web... et ça la fameuse intelligence collective devrait pouvoir le révéler. Et pendant ce temps des milliers d’actionnaires viennent de conforter leur portefeuille, des territoires entiers sont toujours autant meurtris... l’intelligence collective nous fait croire que nous sommes individuellement plus forts mais finalement nous nous accrochons à nos réseaux sociaux comme nous nous accrochions dans l’obscurité à notre nounours de chambre d’enfants. Ca y est on nous tient, nous dépendons les uns des autres de façon fusionnelle, la pensée unique nous guette pourtant nous nous croyons libres... le temps d’une connexion... et dans la rue ?

A la bonne vôtre ;-)

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