Thierry CROUZET
Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web
Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web

Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web

Les consciences s’éveillent. Il était temps. Affordance dénonce les risques pour l’écosystème du Web, Framablog et Wired rappellent les dangers pour la confidentialité et la main mise sur nos données, The New York Times proclame le Web comme le plus grand des réseaux social… Enfin Facebook est montré du doigt. Je suis soulagé. Depuis 2007, j’avais l’impression de me battre contre des moulins à vent et de pousser des gueulantes pour rien.

Oui, le Web est le plus grand des réseaux social. Il suffit de lui adjoindre quelques add-ons pour que nous puissions nous passer de Facebook. Zuckergerg est trop con pour que nous ne cherchions pas à détruire son bel empire. Tout cela n’existera plus dans quelques années, à moins que les internautes continuent de succomber au plus primaire des désirs mimétiques.

Mais ne nous focalisons pas sur l’ogre. Toute force centralisatrice constitue un danger pour l’environnement Internet. Non, je ne place pas au-dessus de tout la décentralisation. Dans Croisade, je relève les dangers de structures décentralisées de type essaim, qui nient les individus. En revanche, depuis Le peuple des connecteurs, je dénonce la capacité des structures centralisées à gérer la complexité, d’autant plus la complexité sociale.

Internet et le Web nous offrent des opportunités politiques parce, par leur décentralisation, ils s’adaptent à l’état du monde contemporain. Ils nous aident à nous individuer, à maximiser la complexité, à accroître nos libertés, notamment la liberté d’expression. Les structures centralisatrices, avec leur volonté de puissance et de contrôle, ne peuvent qu’enrayer ce processus. En ce sens, Facebook est un danger pour la socialisation de l’humanité. Lorsque le réseau social est centralisé, nous sommes en dictature. Facebook ne fait que nous y préparer.

C’est à chacun de nous de prendre ses responsabilités. Personnellement, je ne vais plus sur Facebook depuis 2007. Je me contente d’y reproduire automatiquement grâce à des robots les données que je publie ailleurs. Il est hors de question que j’aille dans cet environnement entretenir des liens. J’utilise Facebook pour décentraliser mes données, mais je n’y centralise pas mon activité Web.

Je noue les liens les plus intenses chez moi, sur mon blog. Pourtant, la structure même du blog me satisfait de moins en moins. Mon blog est en effet centralisé. Disponible à un URL donné, hébergé sur un serveur donné. Je pourrais certes proposer des sites miroirs, mais chacun d’eux resterait centralisé et donc vulnérable, à la censure comme aux attaques des pirates qui pourraient vouloir combattre mes idées.

Le Web bien que décentralisé connecte des nœuds localisés, donc des points dans une certaine mesure centraux à leur écosystème respectif. La seule solution, c’est de rendre les sites Web autonomes, d’en faire des paquets de données qui circulent librement sur l’infrastructure sociale et qui communiquent les uns avec les autres pour s’actualiser.

Si le blog même me pose problème, il va sans dire que je vois d’un mauvais œil tous les sites qui reprennent le vieux modèle du portail. Je pense notamment aux sites d’actualités pseudo sociaux qui tentent d’agréger les articles des blogueurs, qui se veulent les vitrines du Web et du monde sur le modèle de la vielle presse. À terme, ils sont tout aussi dangereux que Facebook. Leur centralisation grandissante leur donne un pouvoir grandissant, par appauvrissement incident de la blogosphère, et les rend de plus en plus vulnérables aux jeux de pouvoir.

Hommes et femmes libres, nous devons nous tenir à distance d’eux. Continuer à créer des îles sur le Net et à les interconnecter pour tresser une architecture sociale animée de liens profonds.

Notes

  1. Je sais qu’on peut gagner de l’audience en s’activant sur Facebook. Je crois que nous ne devons pas nourrir la bête, sinon il ne faudra pas se plaindre plus tard. La pollinisation doit s’effectuer de pair à pair.
  2. OK, j’ai créé coZop.com, c’est un service centralisé. Dès que j’aurais le temps, et surtout le courage, je virerai le système de replublication systématique, pour ne conserver que le mécanisme de recommandation sociale.
Fredox @ 2010-05-17 10:10:56

RT @crouzet: Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://bit.ly/bwejFU

Yann @ 2010-05-17 10:46:59

reading : Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web - http://blog.tcrouzet.com/2010/05/17/facebook-danger/

JS @ 2010-05-17 12:03:26

"L’état du monde contemporain" me paraît être un raccourci fourre-tout qui n’explique rien... Ou je rate une référence ?

TC, n’avez-vous pas peur d’établir une confusion entre les structures politiques où s’exerce la démocratie, et les structures de communications qui peuvent servir de support à qui veut relayer cet exercice ? En quoi des sites web et leurs choix commerciaux pourraient nous faire basculer "en dictature" ?

"Mon blog est en effet centralisé"... Je reste sans voix en lisant cela car après tout, un journal est, d’une certaine manière "centralisé"... Ou alors j’ai raté quelque chose de la possible "décentralisation" de Libération, du Monde, et de leurs chroniqueurs et journalistes ?

Patrice Prud’homme @ 2010-05-17 12:08:55

? @crouzet: Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://bit.ly/bwejFU

Thierry Crouzet @ 2010-05-17 12:13:26

Je ne confonds rien du tout... pour moi toute structure centralisée est une structure de pouvoir qui s’oppose à la liberté individuelle. Je ne dis pas qu’il ne faut pas de telles structures, mais à choisir je préfère qu’elles restent publiques, entre nos mains citoyennes.

Oui la presse est aujourd’hui centralisée, elle l’est d’autant plus aujourd’hui avec les concentrations... les médias sont devenus des armes de pouvoir. Centralisation, implique vulnérabilité. Je trouve ça plutôt dérangeant pour les sources d’informations.

J’ai un faible pour le modèle du livre qui circule de main en main et qui a coupé tout lien avec son auteur, son imprimeur, son éditeur... Pour moi, c’est un modèle de décentralisation dont nous devrions nous inspirer pour penser l’avenir du Web. Tout cela à l’opposé de Facebook et des centres commerciaux.

Mikiane @ 2010-05-17 12:44:43

L’idée n’est pas de nourrir "la bête Facebook" de façon exclusive! La pollinisation c’est la diffusion massive sur tous les réseaux possibles. Facebook étant aujourd’hui majoritaire, il convient de ne pas le laisser de coté. Suis assez en phase sur cette idée de pollinisation pair à pair. Mais concrètement, aujourd’hui, ça passe par twitter, le mail et... Facebook.

Autres idées, bienvenues.

Facebook face aux geeks @ 2010-05-17 12:45:30

La différence entre Facebook et les blogs, c’est qu’on n’y trouve pas que des geeks.

Pour remplacer Facebook, il faut trouver un système très simple qui permet à des non-geeks d’être présents et actifs.

Si l’on revient au système des blogs avec seulement une minorité d’acteurs, c’est une perte.

(Même les skyblogs n’offraient pas cette variété. En dehors des millions d’ados, on n’y trouvait pas le vrai public).

-

Il y a chez certains blogueurs une tentation de toujours vouloir se retrouver entre eux, et de ne pas aimer les lieux où arrive le grand public :

dès qu’un réseau social devient populaire, ils font l’éloge d’un petit nouveau où ils se retrouvent à quinze : Twitter, Friendfeed, etc.

Personnellement ça ne m’intéresse pas trop de retrouver un micro-réseau avec toujours les mêmes blogueurs qui parlent toujours des mêmes choses et de la même façon.

J’ai critiqué Facebook à son arrivée en France, mais maintenant que l’outil est en place et qu’on peut enfin construire des échanges avec un public large et varié, je n’ai pas tellement envie de quitter ce monde varié pour me retrouver avec 30 geeks sur un nouveau micro-réseau expérimental.

30 geeks qui parleront encore et toujours des mêmes choses : IPAD, avenir du journalisme, la quéquette de Jean Sarkozy partout, etc.

Un monde geek tellement appauvri qu’un marketeux comme Versac y fait figure de penseur...

Avec un Voisin en grand maître des cérémonies sociales...

Non merci ! Je préfère encore Facebook avec ses dangers, à cet appauvrissement.

--

Mais il est sûr qu’à partir du moment où Facebook est en train de devenir le Web, il ne peut plus se comporter avec l’arbitraire d’une société privée. Il a des devoirs d’ouverture puisqu’il a tué toute alternative.

Facebook devenant le Web, il ne devrait par exemple pas avoir le droit d’exclure un membre ou de supprimer une page, sauf motif légal grave le justifiant.

Les conditions d’utilisation doivent être revues pour être moins arbitraires.

Thierry Crouzet @ 2010-05-17 12:57:21

@Mikiane Comme je le dis... je ne fais de la présence sur FB que via robot. Mais dire qu’on n’a pas le choix aujourd’hui, c’est s’avouer vaincu. On a le choix de ne pas y aller pour des raisons morales même si tout le monde y va. C’était un peu ça au temps de l’esclavage. Certains esclavagistes renonçaient...

@000 Il suffit de créer un réseau social décentralisé... les jeunes y travaillent http://www.joindiaspora.com/ La centralisation n’est pas une fatalité.

C’est pas le nombre de gens qui me dérangent sur Facebook mais la réinvention de la dictature.

100 000 euro @ 2010-05-17 14:01:49

"les jeunes y travaillent"

Oui j’ai vu ce truc, mais on ne sait pas trop qui ils sont, ils ont peut-être juste flairé un bon coup pour empocher 100 000 euro...

De toute façon il faudra 5 ans avant que le grand public se retrouve là.

Je trouve qu’on passe beaucoup de temps à changer d’outils sans arrêt, sans jamais avoir le temps d’approfondir avec les outils existants.

Tous les ans on nous présente un nouveau lieu social où il faut migrer pour fuir les défauts du précédent...

Même les outils décentralisés s’opposeront les uns aux autres. Ce bougisme est pénible.

J @ 2010-05-17 14:13:56

@TCrouzet

Un petit passage comme ça -:)

Je ne crois pas que la majorité des internautes ait même la "capacité" de s’émanciper de Facebook, ou au moins d’y demander des comptes ; trop pris par la jouissance de l’animalité sociale dans le cadre de cette plateforme au demeurant très bien faite, en tout cas avant qu’elle cède sa place à autre chose (qui connaissant un peu l’histoire mouvementée du net peut croire Facebook définitif???).

Par contre, et c’est là que les ’’geeks’’ et les gens conscients et responsables ont un rôle à jouer, c’est qu’il va bien falloir faire rentrer Facebook dans le cadre d’une législation concernant la collecte des informations privées, leur utilisation, et la possibilité d’y accéder.

Personnellement, ce n’est pas le fait que les masses se ruent sur Facebook qui m’effraie, les masses c’est comme ça (et je ne crois pas à l’effet d’individualisation du net, comme une fois de plus FB le montre) ; mais bien plutôt qu’on laisse les masses dans l’ignorance et littéralement sans défense.

Thierry Crouzet @ 2010-05-17 14:56:40

Je ne crois pas non plus que le Net favorise en lui-même l’individuation... mais que c’est un outils pour faciliter la vie de ceux qui veulent s’individuer.

JS @ 2010-05-17 17:36:41

Merci, TC, pour ces éclaircissements, je comprends un peu mieux votre article. Je suis d’accord sur le "entre nos mains citoyennes", mais cela passe par l’Etat, nécessairement centralisé et lié à une Histoire nationale ; c’est toujours là que je crains la contradiction entre la nécessaire centralisation du pouvoir délégué sous contrôle démocratique, et le rêve décentralisé qui rempli les poches des fonds d’investissements, chaque jour que l’UE et le FMI imposent leurs règles (régionalisation, réduction du budget de l’Etat, déréglementation, tout ce qui bloque la circulation des capitaux et la hausse continuelle du profit...) C’est l que je vois un danger démocratique: dans confondre d’un côté la décentralisation de la parole et l’individualisation des points de vue, avec de l’autre la décentralisation du pouvoir économique et social, et la privatisation (par opposition à la mise en commun, nationalisation). L’Etat aurait dû depuis longtemps prendre en charge le réseau et ses espaces publics, comme il le fait des villes et de leurs espaces publics...

pierre-yves revaz @ 2010-05-17 17:55:28

Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://ow.ly/1M9UX

Thierry Crouzet @ 2010-05-17 17:55:57

L’état a toujours été centralisé mais ont peut imaginé un état décentralisé... si si, j’évoque souvent cette possibilité (une forme de gouvernance multicéphale à la Internet).

Heureusement que l’état actuel ne dispose pas d’internet car il nous l’aurait centralisé.

C’est maintenant que nous disposons d’une infrastructure planétaire décentralisée que nous pouvons commencer à rêver de l’état qui va avec (le contraire impossible).

Medifocus @ 2010-05-17 17:58:04

RT @pierreyvesrevaz: Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://ow.ly/1M9UX

Roch Guilabert @ 2010-05-17 18:14:39

Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web - http://blog.tcrouzet.com/2010/05/17/facebook-danger/

Guy Lavoie @ 2010-05-17 21:31:08

RT @pierreyvesrevaz Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://ow.ly/1M9UX

NO @ 2010-05-18 00:52:13

"J’ai critiqué Facebook à son arrivée en France, mais maintenant que l’outil est en place et qu’on peut enfin construire des échanges avec un public large et varié, je n’ai pas tellement envie de quitter ce monde varié pour me retrouver avec 30 geeks sur un nouveau micro-réseau expérimental."

Je comprends l’argumentation autour de l’idée que les blogs tourneraient en rond, que les geeks aiment se retrouver entre eux sur des réseaux non pollués par les masses etc mais prétendre qu’à l’opposé il y aurait Facebook comme lieu d’échange et de rencontre avec, je cite, "un public large et varié" je trouve ça malhonnête. Sur facebook, on ne fréquente que ses "amis", c’est un système fermé. Un inconnu ne va pas entrer et lancer une discussion nouvelle, tel que cela pourrait se produire dans les commentaires d’un blog. Les publics varient peut être, les profils sociologiques des utilisateurs de facebook sont surement plus larges que ceux des blogueurs mais pour autant facebook n’est pas l’espace public d’Habermas.

Sinon, je me pose une autre question : cette économie du like, autrement dit le web social, remplaçant celle du lien et le référencement à la google, et qui fait si peur aux blogueurs, n’est ce pas une réaction quelque peu aristocratique ? Car au fond, le référencement fondé sur les liens se construit via une certaine catégorie d’acteurs (éditeurs, blogueurs... tenanciers de site en tout genre) qui se link et se relink entre eux. Le modèle de facebook brise la hiérarchie et permet à chacun de donner son avis et donc d’établir un référencement plus démocratique. Évidemment je ne dis pas que la popularité est gage de qualité tout comme la démocratie n’est pas un régime parfait...

000 @ 2010-05-18 01:14:29

"Sur facebook, on ne fréquente que ses “amis”, c’est un système fermé."

Non, c’est une question d’usage.

Personnellement, je n’ai pas ajouté ma famille ni mes amis d’enfance sur Facebook.

Je sais comment les retrouver et où leur parler, pas besoin de Facebook.

Facebook me sert à entrer en contact avec des inconnus, partageant mes sujets d’intérêts, et avec lesquels je monte des projets.

Je ne me sers d’ailleurs pas de mon compte personnel pour cela, mais d’un compte pro, dédié à cet usage.

Je n’y raconte pas ma vie, il n’y a rien de privé.

C’est un peu en marge des conditions d’utilisation de départ de Facebook, mais Facebook doit évoluer en ce sens, en offrant cette infinie base de données pour permettre des mises en relations nouvelles et créatrices, sortant du cadre copains d’enfance / famille / copains de fac ou de bureau.

Barth @ 2010-05-18 06:57:43

http://tinyurl.com/27s8kat Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web

Socratagora @ 2010-05-19 08:19:40

Mieux que "Diaspora", un nouveau projet est lancé.

Projet 100% décentralisé, il permet de maintenir les conversations privées, sans aucune trace sur un serveur central.

Le concept : chacun se connecte en local au café du commerce, et échange librement des paroles avec les voisins, avec sa bouche.

Envoyez vos dons : chezroger@cafeducommerce.zoulou

Dès qu’on réunit 500 000 euro, on réfléchit aux lignes de codes pour l’orientation optimale des tables.

Morbleu ! @ 2010-05-26 13:47:02

Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://yoolink.to/929

Adngold @ 2010-05-26 21:10:12

Facebook n’est pas le seul danger qui plane sur le Web http://bit.ly/aejuUh

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