Thierry CROUZET
Comment obtenir un prix Goncourt
Comment obtenir un prix Goncourt

Comment obtenir un prix Goncourt

Je poursuis mes petits jeux statistiques sur la répartition des phrases dans quelques textes célèbres ou non… quelques surprises amusantes (rien de tout cela n’est très sérieux).

El James, Cinquante nuances de Grey

Attaque très rapide, propre au roman populaire qui dénote une prédominance des dialogues. Avec un nombre extraordinairement grand de phrases de moins de 20 caractères. On frôle l’onomatopée littéraire. En même temps, cette structuration n’est pas très éloignée de Ciseaux de Michaka et de La Quatrième Théorie. C’est peut-être ça l’écriture contemporaine après tout.

Jérôme Ferrari, Le sermon sur la chute de Rome

J’ai pas encore lu ce texte, mais comme il traîne sur le Net, je l’analyse pour avoir sur lui un a priori statistique. Surprise de découvrir un profil proustien. Proust nouvelle référence du classicisme français. Faut-il avoir un profil proustien pour obtenir un prix littéraire ?

Houellebecq, La Carte et le territoire

Du coup, je teste un autre Goncourt. Un poil moins proustien, mais tout de même un large spectre. Auteurs, vous êtes avertis. Des livres comme Ciseaux, La Quatrième Théorie ou mon Ératosthène à venir ne peuvent obtenir de prix parce qu’ils jouent petit bras.

Céline, Voyage au bout de la nuit

Forme quasiment identique à celle obtenue pour Transparence d’Ayerdhal, et que je soupçonne d’être caractéristique des romans « classiques », en ce sens parfaitement lisibles, tout en adoptant un rythme varié. Mais aucune chance pour le Goncourt.

Crouzet, L’Alternative Nomade

J’ai analysé cet essai écrit en même temps que La Quatrième Théorie. Et je n’y retrouve aucun signe de l’influence de Twitter. En fait, sa signature graphique est quasi identique à celle du Peuple des connecteurs. Est-ce que les essais ont toujours une signature en gaussienne ? C’est le cas pour Autobiographie des Objets de François Bon, qui sans être un essai n’est pas un roman canonique (pas de dialogue par exemple).

La présence des dialogues implique une attaque rapide du graphique ce qui signifie une dominance des phrases courtes. On différencie alors les romanciers par le spectre plus ou moins étendu de leur longueur de phrase.

Stendhal, Le Rouge et le Noir

Mais ma théorie ne tient pas. Stendhal nous a donné un pur roman avec une gaussienne que je croyais caractéristique des essais. Une explication toutefois : les dialogues sont très amples, souvent découpés par des points virgules.

Proust, Du côté de chez Swan

Courbe intégrale qui montre que Proust possède le plus large spectre de la littérature française. Certaines phrases approchent les 3000 signes.

Thierry Crouzet @ 2012-12-07 12:34:58

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Phil @ 2012-12-07 12:39:45

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Simon Tripnaux @ 2012-12-07 13:08:37

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Double X @ 2012-12-07 15:14:21

Je crois que la phrase la plus longue de Proust fait 5226 signes.

Mais il y a 11 point-virgules.

("Au bord de l’abîme, je m’accroche au point virgule." - Matzneff)

Dans Sodome :

"Sans honneur que précaire, sans liberté que provisoire, jusqu’à la découverte du crime ; sans situation qu’instable, comme pour le poète la veille fêté dans tous les salons, applaudi dans tous les théâtres de Londres, chassé le lendemain de tous les garnis sans pouvoir trouver un oreiller où reposer sa tête, tournant la meule comme Samson et disant comme lui : « Les deux sexes mourront chacun de son côté » ; exclus même, hors les jours de grande infortune où le plus grand nombre se rallie autour de la victime, comme les Juifs autour de Dreyfus, de la sympathie – parfois de la société – de leurs semblables, auxquels ils donnent le dégoût de voir ce qu’ils sont, dépeint dans un miroir qui, ne les flattant plus, accuse toutes les tares qu’ils n’avaient pas voulu remarquer chez eux-mêmes et qui leur fait comprendre que ce qu’ils appelaient leur amour (et à quoi, en jouant sur le mot, ils avaient, par sens social, annexé tout ce que la poésie, la peinture, la musique, la chevalerie, l’ascétisme, ont pu ajouter à l’amour) découle non d’un idéal de beauté qu’ils ont élu, mais d’une maladie inguérissable ; comme les Juifs encore (sauf quelques-uns qui ne veulent fréquenter que ceux de leur race, ont toujours à la bouche les mots rituels et les plaisanteries consacrées) se fuyant les uns les autres, recherchant ceux qui leur sont le plus opposés, qui ne veulent pas d’eux, pardonnant leurs rebuffades, s’enivrant de leurs complaisances ; mais aussi rassemblés à leurs pareils par l’ostracisme qui les frappe, l’opprobre où ils sont tombés, ayant fini par prendre, par une persécution semblable à celle d’Israël, les caractères physiques et moraux d’une race, parfois beaux, souvent affreux, trouvant (malgré toutes les moqueries dont celui qui, plus mêlé, mieux assimilé à la race adverse, est relativement, en apparence, le moins inverti, accable qui l’est demeuré davantage) une détente dans la fréquentation de leurs semblables, et même un appui dans leur existence, si bien que, tout en niant qu’ils soient une race (dont le nom est la plus grande injure), ceux qui parviennent à cacher qu’ils en sont, ils les démasquent volontiers, moins pour leur nuire, ce qu’ils ne détestent pas, que pour s’excuser, et allant chercher, comme un médecin l’appendicite, l’inversion jusque dans l’histoire, ayant plaisir à rappeler que Socrate était l’un d’eux, comme les Israélites disent de Jésus, sans songer qu’il n’y avait pas d’anormaux quand l’homosexualité était la norme, pas d’antichrétiens avant le Christ, que l’opprobre seul fait le crime, parce qu’il n’a laissé subsister que ceux qui étaient réfractaires à toute prédication, à tout exemple, à tout châtiment, en vertu d’une disposition innée tellement spéciale qu’elle répugne plus aux autres hommes (encore qu’elle puisse s’accompagner de hautes qualités morales) que de certains vices qui y contredisent, comme le vol, la cruauté, la mauvaise foi, mieux compris, donc plus excusés du commun des hommes ; formant une franc-maçonnerie bien plus étendue, plus efficace et moins soupçonnée que celle des loges, car elle repose sur une identité de goûts, de besoins, d’habitudes, de dangers, d’apprentissage, de savoir, de trafic, de glossaire, et dans laquelle les membres mêmes qui souhaitent de ne pas se connaître aussitôt se reconnaissent à des signes naturels ou de convention, involontaires ou voulus, qui signalent un de ses semblables au mendiant dans le grand seigneur à qui il ferme la portière de sa voiture, au père dans le fiancé de sa fille, à celui qui avait voulu se guérir, se confesser, qui avait à se défendre, dans le médecin, dans le prêtre, dans l’avocat qu’il est allé trouver ; tous obligés à protéger leur secret, mais ayant leur part d’un secret des autres que le reste de l’humanité ne soupçonne pas et qui fait qu’à eux les romans d’aventure les plus invraisemblables semblent vrais, car dans cette vie romanesque, anachronique, l’ambassadeur est ami du forçat ; le prince, avec une certaine liberté d’allures que donne l’éducation aristocratique et qu’un petit bourgeois tremblant n’aurait pas, en sortant de chez la duchesse s’en va conférer avec l’apache ; partie réprouvée de la collectivité humaine, mais partie importante, soupçonnée là où elle n’est pas étalée, insolente, impunie là où elle n’est pas devinée ; comptant des adhérents partout, dans le peuple, dans l’armée, dans le temple, au bagne, sur le trône ; vivant enfin, du moins un grand nombre, dans l’intimité caressante et dangereuse avec les hommes de l’autre race, les provoquant, jouant avec eux à parler de son vice comme s’il n’était pas sien, jeu qui est rendu facile par l’aveuglement ou la fausseté des autres, jeu qui peut se prolonger des années jusqu’au jour du scandale où ces dompteurs sont dévorés ; jusque-là obligés de cacher leur vie, de détourner leurs regards d’où ils voudraient se fixer, de les fixer sur ce dont ils voudraient se détourner, de changer le genre de bien des adjectifs dans leur vocabulaire, contrainte sociale légère auprès de la contrainte intérieure que leur vice, ou ce qu’on nomme improprement ainsi, leur impose non plus à l’égard des autres mais d’eux-mêmes, et de façon qu’à eux-mêmes il ne leur paraisse pas un vice."

Jacques Perconte @ 2012-12-07 16:43:30

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Marin Favre @ 2012-12-08 00:47:28

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Christine Genin @ 2012-12-08 15:53:58

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Watcher @ 2012-12-08 15:57:54

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Alexandre Vasseur @ 2012-12-08 16:49:31

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Paul Gueu @ 2012-12-09 08:36:07

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