Thierry CROUZET
Message à nos rénovateurs politiques : vous buguez
Message à nos rénovateurs politiques : vous buguez

Message à nos rénovateurs politiques : vous buguez

Politiciens, je vous aime, j’apprécie votre énergie débordante, je salue vos idées, mais je suis chagriné. J’ai passé 2012 en compagnie d’Ératosthène, à chercher à comprendre pourquoi les Grecs du IIIe siècle avant JC avaient rejeté ses idées et je retrouve à l’œuvre chez vous les mécanismes qui jadis ont conduit à la fin d’un âge d’or.

Pour la plupart, vous ne remettez pas en question la nécessité du pouvoir. Vous en critiquez la corruption, les débordements, les imperfections, mais vous refusez de mettre au rebu le mode de management patriarcal.

« Nous avons toujours eu des chefs, nous aurons toujours des chefs », dites-vous en substance. Et si le bug c’était justement ce dogme, et s’il n’était pas perfectible, et s’il fallait tout simplement, peu à peu, s’en débarrasser ?

Tirage au sort et non-cumul des mandats ne valent guère mieux que le népotisme électoral ou que la dictature des experts. Ouvrez les yeux ! Adeptes de ces écoles, parce que vous menez un combat en apparence juste, vous attirez des sympathisants et oubliez cette sagesse immémoriale : nul homme ou femme, ou presque, n’est capable de résister au pouvoir.

Dans ma jeunesse, quand je suis devenu rédacteur-en-chef et que j’ai héréité d’un peu de pouvoir, je me suis vu changer. Depuis, je n’ai cessé de voir les gens changer sous le même joug. Vous aussi avez changé. Difficile de garder ses distances, de ne pas succomber au charme des responsabilités et de la gloriole qu’elles engendrent. On est soudain plus beau, plus attirant, plus sexy, et parfois même plus riche, et si on ne l’est pas, on vit tout de même comme un riche. Regardez votre façon de vous habiller, de vous tenir, de parler. Vous ne remarquez rien. Vous sentez déjà le vieux politicien rabougri.

Le pouvoir est nocif. Même à petite dose. Déjà dans les associations de quartier les présidents se la jouent. Vous-même ne résistez pas au plaisir d’être des leaders d’opinion. Vous tombez dans le piège que vous dénoncez.

Bon sang, changez de fusil d’épaule. Le pouvoir ne doit pas être donné ou loué ou concédé. Il soit être réparti, distribué entre tous. Voilà pourquoi j’attache une importance démesurée aux idées qui vont en ce sens. J’en liste quelques-unes, pour le plaisir, aussi parce que, il faut le répéter, notre avenir ne sera radieux qu’à travers elles.

  1. Revenu de base. Distribution de la création monétaire.
  2. Domaine public. Distribution de la culture.
  3. Open source. Distribution du code informatique.
  4. Internet. Distribution de l’information, de la puissance de calcul, de la communication…
  5. Imprimantes 3D. Distribution de la capacité de production industrielle.
  6. Énergies renouvelables. Distribution de la production énergétique.
  7. Amap. Distribution de la production alimentaire.

Notre avenir se joue sur ces champs de bataille, non pas dans ceux que vous menez. Oubliez les hommes et les femmes de pouvoir, faites en sorte qu’ils en aient de moins en moins parce que nous en aurons toujours plus. Ne cherchez pas des subterfuges pour les limiter. Rendez tout simplement le pouvoir abondant. Libérez-le.

Petite objection au tirage au sort

Supposons-le instauré. Qu’est-ce qui empêche des partis de se former, les gens de se réclamer des uns et des autres, et puis de prendre le pouvoir en leur nom quand ils sont tirés au sort, et même de procurer quelques avantages aux membres de leur parti, ce qui incitera plus de gens à le rejoindre ? Rien. Le tirage au sort ne présente que peu d’avantages par rapport aux modèles électifs : il serait sans doute plus économique, mais beaucoup moins amusant (et nous avons besoin de divertissements, le jeu politique n’étant pas des moindres, il a pour vertu de détendre l’atmosphère le temps des élections).

Luc Prévost @ 2013-02-17 05:03:01

Je/vous...?

Le reste est parfait.;-)

Louis Boël @ 2013-05-02 11:31:13

... NOUS ! et tout est parfait ;-) et je partage tout partout (à ma portée, je ne suis pas développeur de moteurs d’inondation informatique ;-)))

pierro78 @ 2013-08-19 02:49:05

tres intéressante cette idee de redistribuer les pouvoirs !!

si des citoyens arrivent a s’approprier ces pouvoirs il est probable qu il s’approprieront aussi plus de pouvoir politique (lois, institutions ...)

pierro78 @ 2013-08-19 03:39:11

un point qui est important egalement, dans une vraie democratie, c’est le concept d amateurisme politique :

le pouvoir politique de decider les choses importantes est donné a chaque citoyen ... des "institutions" comme le tirage au sort, le non-cumul, la revocabilité, la reddition des comptes, la docimasie permettent d’amoindrir et controler le pouvoir politique des "agents publiques" qui ont le plus de pouvoir ...

Loulou @ 2013-08-19 08:13:07

Bonjour, oui pour vos principes, mais vous oubliez que certains parmi ceux que vous critiquez proposent justement de refuser les "maitres politiques" et de laisser le vote des lois uniquement au peuple. Donc de laisser le pouvoir au peuple directement, sans representants.? Ce qui va dans votre sens.

Didlan @ 2013-08-19 11:25:08

Bonjour,

C’est bien dans ce dogme qu’il faille chercher les blocages. Mais ils sont préparés, assaisonnés, développés dès l’enfance par le système scolaire qui fait la confusion volontaire entre autorité et obéissance. La révolte se fait vis à vis de l’obéissance, du commandement, des ordres provenant du haut de cette pyramide qui nous est dit "indispensable" à notre forme de société.

L’autorité ne doit pas être dépendante d’une institution mais d’une personne, de son savoir qu’elle partage. Parler d’autorité aux gens et vous conviendrez qu’ils font la confusion. Combien de fois n’entendons-nous pas qu’un enfant refuse l’autorité ? Notamment à l’école. Hors l’enfant ne refuse pas le savoir, bien au contraire, mais l’obligation de faire, d’obéir. Pensez à Jean Jacques Rousseau, qui était un précepteur, avait autorité sur ses élèves mais ceux-là n’avait n’avaient aucune obligation d’obéissance. Il y avait un véritable échange de savoir et l’un et l’autre apprenaient. Dans une classe de 25 à 35 élèves, surtout au primaire, l’échange est devenu impossible.

Un peu plus tard, dans le secondaire, il est nommé un chef de classe pour représenter les élèves. Un chef déjà prédisposé à commander. De même comme pour le mot démocratie qui est employé par son contraire, le mot autorité est employé pour apprendre aux enfants, puis aux adultes que, seule, l’obéissance permet à nos sociétés de fonctionner.

Cette confusion, depuis Jules Ferry et d’une école laïque, gratuite et OBLIGATOIRE (1881 à 1885), ce dernier était bien conscient quand il dit, je site :

"la consolidation du régime politique né en 1875 passe par l’instruction publique. En laïcisant l’école, ils veulent affranchir les consciences de l’emprise de l’Église et fortifier la patrie en formant les citoyens, toutes classes confondues, sur les mêmes bancs."

Il est évident que la construction de notre système de société passe par le conditionnement des enfants. Nous y sommes passés aussi et nos pensées sont déformées.

Bonne journée,

Didlan

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