Michel Bauwens vient de publier un article From the Communism of Capital to a Capital for the Commons qui fait écho à mon Grand siphonnage des biens communs. Le constat est simple : des entreprises s’emparent des biens communs pour maximiser leurs revenus, parmi les biens communs on trouve notamment les ressources librement distribuées sur le Net, Linux par exemple. Le flux est quasiment à sens unique, des communautés libristes vers les capitalistes, ces derniers s’enrichissent tout en oubliant de redistribuer leurs richesses. Il est temps d’activer le flux retour, sinon la machine explosera.
Michel Bauwens suggère l’adoption de la Peer Production License imaginée par Dmytri Kleiner. Si je diffuse un texte sous cette licence, les éditeurs qui voudraient le distribuer devraient me rémunérer en retour. Aujourd’hui, je simule cette licence en choisissant une Creative Commons Non Commerciale et, au cas par cas, en accordant des droits commerciaux à certains éditeurs. Je force le flux retour.
Ce flux du libre vers le capitalisme et réciproquement est ce que j’appelle l’économie de paix dans Le geste qui sauve. Un exemple de cette économie :
- Didier Pittet montre que l’hygiène des mains avec une solution hydro-alcoolique divise par deux l’incidence des maladies nosocomiales.
- Les compagnies déposent des brevets de solution et les vendent au prix fort.
- Exaspéré, Didier offre à l’humanité via l’OMS le Geneva Model pour l’hygiène des mains, notamment une formulation économique et efficace d’une solution hydro-alcoolique.
- Les brevets des compagnies n’ont plus aucun intérêt, elles en veulent à mort à Didier.
- La formule étant ouverte, tout le monde peut fabriquer la solution. Son usage se dépend en quelques années à la planète.
- Les bénéfices dans les hôpitaux sont tels que la consommation de solution augmente au point qu’ils n’arrivent plus à la fabriquer eux-mêmes. Ils demandent aux laboratoires le les fournir, mais tout en connaissant les coûts réels de production.
- Le marché des solutions explose. Les compagnies gagnent peu à chaque flacon, mais vendent beaucoup. Elles s’y retrouvent.
- L’ouverture de la formule a d’une certaine manière cassé la concurrence sur le marché. Les compagnies coopérèrent et se rassemblent dans une organisation, le POPS, sous l’égide de l’OMS.
- Désormais, le POPS soutient le développement de l’hygiène hospitalière dans le monde. Il finance la recherche. Il finance même mon livre, dans un flux retour.
Ce mécanisme apparaîtra j’espère plus clairement dans le livre. Mais vous voyez que nous avons des entreprises privées qui sur le marché des solutions hydro-alcooliques ont abandonné l’économie de prédation pour une économie de coopération qui implique un flux retour. Cela s’est effectué sans licence, mais avec l’omniprésence de Didier, servant sans cesse de garde-fou et de garant de l’éthique.